L'édito de Pascal Boniface

Attentats de Charlie, Ukraine, Grèce… Le bon bilan diplomatique de François Hollande

Édito
23 août 2015
Le point de vue de Pascal Boniface
Alors que va s’ouvrir le 24 août la désormais traditionnelle « Semaine des ambassadeurs », quel bilan tirer de l’action diplomatique de François Hollande depuis 2012 ?

Si les résultats positifs en matière économique et sociale sont encore loin d’être visibles, l’action extérieure semble satisfaire les Français.

Les sondages montrent que s’ils sont mécontents sur le premier point, ils accordent un satisfecit à l’exécutif pour le second. Les Français ont apprécié l’attitude du président après les attentats des 7 et 9 janvier. Laurent Fabius (Affaires étrangères) et Jean-Yves Le Drian (Défense) sont d’ailleurs les plus populaires des ministres.

C’est une maigre consolation pour François Hollande car c’est avant tout sur les questions économiques et sociales que se jouera son éventuelle réélection de 2017.

Mais François Hollande a tout de même décrispé, avec un certain nombre de pays, les relations bilatérales qui s’étaient dégradées lors du quinquennat précédent. L’énergie et le sens de la formule de Nicolas Sarkozy avaient parfois créé une crispation. La relation est plus tranquille avec nos partenaires européens. Les malentendus, parfois graves, que l’on a pu avoir avec le Japon, la Chine, l’Inde, la Turquie, le Brésil, l’Algérie ou encore le Mexique, ont été dissipés.

L’intervention militaire au Mali constituera un acte majeur du quinquennat. Certes la situation est encore fragile mais il faut se demander ce qui se serait passé en cas d’inaction française. Les djihadistes auraient tout simplement pris Bamako. L’équivalent d’un État islamique en Afrique aurait été créé.

Au-delà du pire qui a été évité, ce sont les modalités de l’intervention qui doivent rester en mémoire : réactivité dans la décision (alors que l’on accuse Hollande de procrastination), intervention faite à la demande des autorités nationales avec le soutien de la population, recherche d’un soutien international aussi bien régional qu’à l’ONU, et surtout (ce qui n’a pas été fait en Libye) réflexion sur le jour d’après.

L’intervention militaire doit toujours se faire dans la recherche d’une solution politique. On peut également penser, même si la situation reste fragile, que l’on a probablement évité un génocide en République centrafricaine.

L’action de la France face à la crise ukrainienne a également été positive. Des sanctions ont été prises contre Moscou (pour préserver un consensus européen), mais il n y a pas eu suivisme des Américains. Le contact a été conservé. Malgré les critiques, François Hollande a maintenu l’invitation de Poutine aux cérémonies anniversaire du débarquement en Normandie. Il s’est rendu à Moscou pour le voir en décembre 2014.

Tout ceci a pu déboucher sur des accords de Minsk en février, grâce au couple franco-allemand. Là encore, il demeure une très grande fragilité de la situation. Mais la solution diplomatique a prévalu au détriment de celle consistant à mettre de l’huile sur le feu en livrant de façon inconsidérée des armes à l’Ukraine.

De même, alors que plus grand monde ne croyait possible d’éviter le Grexit, l’intervention de la France a été décisive pour trouver une solution de compromis acceptable par Berlin et Athènes.

Tant sur le dossier ukrainien que sur le grec, les reproches de prudence et de manque d’énergie adressés à François Hollande ont été pris à contrepied. Il n’a jamais été dans les déclarations spectaculaires, satisfaisantes pour les médias ou une partie du public.
La recherche du consensus et un sens de la synthèse, certainement travaillé dans sa vie politique antérieure, lui ont permis de trouver un point d’équilibre. Il y a manifestement une méthode Hollande privilégiant la patience et la discrétion.

L’accord trouvé sur le nucléaire iranien est à mettre au crédit de Laurent Fabius, le ministre des Affaires étrangères et du Développement international, que certains accusaient de néo-conservatisme. Le fait de durcir les conditions n’a pas empêché de trouver un accord, mais l’a rendu beaucoup plus solide et plus opposable à ceux qui voulaient privilégier une solution militaire.

Il est peu probable que, dans son discours du 25 août devant les ambassadeurs, François Hollande livre une vision globale du monde. Il est avant tout pragmatique et n’aime pas être enfermé dans un cadre conceptuel – pour lequel Fabius a plus de goût.

Dans ses trois derniers discours, il avait ainsi plutôt abordé les questions diplomatiques sujet par sujet. Il peut considérer que cela ne l’empêche pas d’être efficace. Ce n’est pas faux. On peut néanmoins regretter que cela suscite une moins grande adhésion à notre politique au-delà de nos frontières. L’image de la France à l’étranger, c’est aussi cette capacité dont nous sommes crédités à pouvoir penser de façon globale.
Tous les éditos