L'édito de Pascal Boniface

François Hollande en Afrique : le bilan provisoire de sa politique étrangère

Édito
12 octobre 2012
Le point de vue de Pascal Boniface
Les partisans de Nicolas Sarkozy ont lancé une campagne contre François Hollande,l’accusant de ne pas défendre le rang de la France au niveau international. Ils comparent l’activisme de l’ancien président avec un supposé immobilisme du nouveau.

Il est vrai que François Hollande ne s’était pas distingué avant son élection pour un goût prononcé pour les questions stratégiques. Au cours de la campagne électorale, il a volontairement évité de se lancer sur les sujets régaliens. Mais curieusement Nicolas Sarkozy, qui était supposé avoir un avantage en ce domaine, ne l’a jamais entraîné sur ce terrain au cours de la campagne électorale.

À peine élu, François Hollande était lancé dans le grand bain diplomatique en enchaînant le sommet du G8 et de l’OTAN. Il a résisté aux pressions de Barack Obama sur le retrait anticipé des soldats français d’Afghanistan et, en échange, ne l’a pas affronté sur le bouclier antimissile. Mais de l’avis général, l’examen de passage a été réussi.

Le scénario de la mort de l’euro évité

Par la suite, la priorité absolue de François Hollande a été le sauvetage de l’euro. Il y avait eu, l’année précédente, une profusion de sommets européens qualifiés chacun "de la dernière chance", sans qu’aucun d’entre eux ne débouche sur une solution pérenne.

François Hollande a réalisé une synthèse entre les pays d’Europe du Sud et la ligne de la chancelière allemande Angela Merkel, et obtenu le soutien du président de la Banque centrale européenne. Il serait prématuré de dire que la crise de l’euro est finie. Toujours est-il que le scénario prévoyant sa mort prochaine n’est plus évoqué.

L’idée d’une taxation sur les transactions financières émise par Hollande est par ailleurs aujourd’huiplus largement admise au niveau de l’Europe.

La délicate gestion de la crise syrienne

C’est sur la Syrie que les attaques contre François Hollande ont le plus porté. Les partisans de Nicolas Sarkozy mettaient en avant l’action déterminante de ce dernier dans l’affaire libyenne et l’impuissance de François Hollande à résoudre la crise syrienne. Si effectivement une guerre civile atroce semble devoir se poursuivre en Syrie, la comparaison entre les deux situations n’est pas pertinente.

Tout d’abord, c’est bien parce que les pays occidentaux ont modifié le sens de la résolution 1973 en Libye, en passant de la responsabilité de protéger, qui avait été acceptée par la Russie et la Chine, à celle de changement de régime, qu’aujourd’hui Moscou et Pékin refusent de donner un nouveau feu vert au Conseil de sécurité de l’ONU.

Par ailleurs, la situation stratégique et militaire n’est pas comparable. L’armée syrienne a des capacités bien plus importantes que l’armée libyenne. Une intervention militaire en Syrie, de surcroît sans feu vert du Conseil de sécurité, risquerait plus de déboucher sur une catastrophe que sur un succès rapide. On peut d’ailleurs remarquer qu’il n’y a pas, vis-à-vis de la crise syrienne, un pays qui freine (la France) contre d’autres pays (États-Unis, Grande-Bretagne) qui voudraient aller vite.

Tous les pays occidentaux qui ont participé à la guerre civile en Libye ont une position commune de non-participation à celle qui se déroule en Syrie.

Japon, Mexique, Turquie : la réconciliation est en marche 

François Hollande a par contre mis en œuvre une politique de réconciliation avec des pays qui s’étaient brouillés avec la France lors de la présidence de Nicolas Sarkozy.

Le Japon avait été vexé de ne pas recevoir de visite officielle du président français, qui a fait des remarques jugées insultantes sur le sport national, le sumo.

Nicolas Sarkozy répétait régulièrement que la Turquie n’avait pas sa place dans l’Union européenne, les relations s’étaient tendues avec le Mexique suite à l’annulation de l’année du Mexique en France à propos d’une citoyenne française emprisonnée dans ce pays. Le discours de Dakar de 2007, dans lequel Sarkozy avait déclaré que l’homme africain n’était pas entré dans l’Histoire, avait été jugé insultant sur le continent.

François Hollande a un tempérament plus rassembleur, alors que Nicolas Sarkozy avait un caractère plus clivant. François Hollande est pondéré. Nicolas Sarkozy est plus activiste, quitte à indexer certains partenaires.

Mais au-delà des tempéraments de chaque président, le statut la France ne change guère. Elle n’est pas une superpuissance, mais elle est encore une puissance qui compte, et ce, quel que soit son président.
Pascal Boniface vient de publier "Comprendre le Monde, les relations internationales pour tous", aux Editions Armand Colin.
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