04.11.2024
La FIFA contre le choc des civilisations ?
Édito
2 novembre 2010
On sait déjà que le Brésil sera le pays qui va accueillir l’édition 2014. La Coupe du Monde devrait revenir en Europe pour 2018. Les deux favoris sont l’Angleterre qui l’a déjà organisé en 1966 et la Russie qui n’a jamais eu cet honneur.
Pour 2022, la compétition est incertaine. Le dossier de l’Indonésie, pays musulman le plus peuplé du monde, a été écarté faute d’un soutien gouvernemental et d’une réelle culture footballistique du pays. Le Japon et la Corée du Sud sont candidats mais avec de faibles chances car ils ont déjà co-organisé l’édition 2002. Restent donc en lice deux pays au profil radicalement différent le Qatar et les Etats-Unis.
Ces derniers qui ont déjà organisé la coupe du monde en 1994 font valoir que celle-ci a été une des plus profitables et a établie un record de fréquentation. Le pays offre toutes les garanties d’infrastructures (stades hôtels transports) .C ‘est donc la promesse d’une Coupe du Monde facile à organiser. Le pays n’a pas une longue tradition footballistique mais compte 24 millions de licenciés. La perspective est donc pour le football de conquérir définitivement le marché américain. Contre le dossier américain, pèsent le faible délai depuis l’édition 1994 et l’étendue géographique du pays, les délégations se répartissant entre quatre fuseaux horaires.
En face le Qatar fait figure de David par rapport au Goliath américain avec son million d’habitants. La petite taille du pays pourrait être un obstacle pour la FIFA. Mais le Qatar qui a un dossier solide. La volonté politique du pays est forte, le président du comité de candidature n’étant autre que le fils de l’émir. Le Qatar propose une Coupe du Monde compacte, tous les stades étant desservi par un réseau de métro moderne .En 2022, 50 % de la population du Moyen-Orient sera âgé de moins de 22 ans il y a donc une véritable perspective de développement pour le football. Par ailleurs la localisation du Qatar qui est à plus 3 heures du méridien de Greenwich permettrait une diffusion à des horaires très intéressant pour l’Europe le Moyen-Orient et l’Asie.
Le Qatar joue également sur la carte technologique avec un système d’air conditionné dans les stades afin de lutter contre les fortes chaleurs et une empreinte carbone neutre grâce à l’énergie solaire. Il y a surtout un argument géopolitique qui est avancé par le Qatar : jusqu’ici aucun pays arabe ou musulman n’a été l’hôte d’une Coupe du Monde ou des Jeux olympiques. Attribuer au Qatar la coupe du monde de 2022 serait un signal fort réparant ce qui pourrait être vécu comme une injustice, comparable dans sa signification avec l’attribution de la coupe de 2010 à l’Afrique du Sud. Le Qatar souhaite faire de la coupe du monde un symbole de coopération interculturelle au Moyen-Orient en agissant comme un lien entre l’Orient et l’Occident.
Petit pays doté d’une puissance financière importante, le Qatar, qui a déjà révolutionné l’information en lançant Al-Jazeera, mise beaucoup sur le sport comme moyen de reconnaissance internationale et de rapprochement interculturel. Il a déjà organisé les jeux asiatiques de 2006 et recevra la coupe d’Asie des nations en 2011. La diplomatie du Qatar est particulièrement active. Le Qatar, entre autre, a œuvré pour un rapprochement des belligérants au Soudan et a aidé à la reconstruction du Liban après la guerre de 2006. Tout en étant ferme sur les positions arabes notamment à l’égard de la Palestine, le Qatar est capable de dialoguer avec Israël lorsque le gouvernement de ce pays fait preuve d’ouverture.
Le choix américain serait le choix du confort. Celui du Qatar serait celui de l’audace. Un signal fort de la FIFA qui mettrait le football au service de la lutte contre le choc des civilisations. A l’heure où les relations entre le monde musulman et le monde occidental sont au cœur de toutes les problématiques stratégiques, la FIFA renforcerait son rôle d’acteur central des relations internationales.