L'édito de Pascal Boniface

Israël/Gaza, RDC, Kyoto : la « communauté internationale » existe-t-elle vraiment ?

Édito
28 novembre 2012
Le point de vue de Pascal Boniface
La communauté internationale, c’est comme le monstre du Loch Ness. Tout le monde en a entendu parler, personne ne l’a jamais vu. Cette boutade a, hélas, été vérifiée dans l’actualité stratégique récente.
 
Les médias et les responsables politiques évoquent sans cesse la communauté internationale. Existe-t-elle réellement ? Oui, s’il s’agit de dire que nous vivons sur la même planète, que les défis sont globaux. Non, s’il s’agit de dire que nous sommes capables de prendre des décisions collectives qui engagent notre avenir commun.
 
Prenons trois exemples.
 
Le conflit israélo-palestinien
 
Israël et le Hamas viennent de s’affronter militairement. La majorité des analystes et responsables politiques s’accordent à reconnaître que le conflit israélo-palestinien est d’une importance stratégique majeure, qui engage l’avenir des relations entre le monde occidental et le monde arabo-musulman. Une fois de plus, les puissances occidentales ont été plus spectatrices qu’actrices dans ce conflit, du fait de leurs liens avec Israël.
 
Chacun connaît les bases de la solution de ce conflit : création d’un État palestinien sur la base des frontières de 1967, Jérusalem capitale partagée des deux États, droit d’Israël d’exister en paix et en sécurité. Mais personne ne veut les imposer.
 
Les pays émergents qui contestent le monopole occidental sur la puissance n’ont pas été plus efficaces. Que font réellement la Russie et la Chine, pourtant membres permanent du Conseil de sécurité ? Que font le Brésil, l’Inde, l’Afrique du Sud, qui revendiquent à l’être sur ce sujet essentiel ? Des communiqués, des protestations et rien d’autre.
 
Le protocole de Kyoto
 
À Doha, il y a peu d’espoir de pouvoir prolonger le protocole de Kyoto, qui arrive à échéance le 31 décembre 2012. Tous les scientifiques s’accordent à dire que le réchauffement climatique est l’une des pires menaces qui pèsent sur l’avenir de l’humanité. Ils partagent également l’opinion selon laquelle c’est l’activité humaine qui en est responsable. Aucune autorité politique ne remet en cause cette double affirmation.
 
Pourtant, alors que les contraintes contenues dans le protocole de Kyoto étaient déjà jugées insuffisantes pour réellement enrayer le réchauffement climatique, les différents gouvernements ont été incapables de se mettre d’accord sur des règles communes. Les États-Unis ne l’ont jamais signé. La Russie, le Canada et le Japon vont en sortir. Chacun fait de grandes envolées lyriques sur le danger du réchauffement climatique, mais aucune décision contraignante n’est prise.
 
La République démocratique du Congo
 
En République démocratique du Congo, le mouvement M23 a pris la ville de Goma, mettant en déroute l’armée nationale. L’ex-Zaïre a souvent été qualifié de scandale géologique tellement il est riche en matières premières minières. Mais c’est pourtant le PIB par habitant le plus faible de la planète (191 dollars par an par habitant !!).
 
Entre 1996 et 2002, les guerres dans cette région, alimentées par les puissances extérieures, notamment le Rwanda et l’Ouganda, ont fait plus de 4 millions de morts. Après un cessez-le-feu, une force des Nations unies a été mise en place. C’est la plus importante opération onusienne qui était engagée, avec plus de 17.000 soldats. Cette force a été tout aussi impuissante vis à vis des mouvements rebelles largement alimentés en sous-main par le Rwanda voisin. Et de nouveau, la population civile est livrée aux exactions, qui, il est vrai, sont autant le fait de l’armée régulière que des forces rebelles.
 
Le droit international, le respect élémentaire des droits humains sont allègrement violés sans qu’il y ait une réaction internationale forte pour y mettre fin.
 
Il y a vraiment une crise de la gouvernance internationale.
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