L'édito de Pascal Boniface

Benjamin Netanyahou réélu en Israël : la perspective d’une paix juste et durable s’éloigne

Édito
27 mars 2015
Le point de vue de Pascal Boniface
Les élections législatives israéliennes ont constitué une victoire pour Benjamin Netanyahou. Alors que les sondages le donnaient en difficulté, il a distancé son rival centriste. Il va constituer un gouvernement très nettement marqué à droite, avec une composante forte d’extrême droite.

Dans les derniers jours de la campagne, il s’est prononcé contre la création d’un État palestinien, revenant sur ses déclarations officielles antérieures.

Il a, en fait, dit le fond de sa pensée. Comme Premier ministre, il a tout fait pour que les négociations soient repoussées ou ne débouchent sur rien. Il a intensifié la colonisation de la Palestine. Dès 1993, il s’était opposé aux accords d’Oslo.

Sa reconduction à la tête du gouvernement israélien éloigne les perspectives d’une paix juste et durable au Proche-Orient. Netanyahou est renforcé sur le plan politique, mais Israël est isolé comme jamais sur le plan international. Le chef de cabinet de la Maison Blanche a déclaré :

« Israël ne peut maintenir indéfiniment le contrôle militaire sur un autre peuple. Une occupation qui dure depuis près de plus de 50 ans doit se terminer. »

Les relations entre Netanyahou et Barak Obama sont au plus bas. Netanyahou, qui s’était déjà engagé contre Barak Obama lors des élections présidentielles de 2012, est venu, devant le Congrès américain, faire un discours frontalement opposé à la politique de rapprochement avec l’Iran que mène la Maison Blanche.

Alors que le soutien à Israël est traditionnellement bipartisan, il a pris le risque de choisir ouvertement le soutien du Parti républicain et de s’opposer au Parti démocrate. Il n’a tenu aucun compte de l’opposition de Barack Obama à la poursuite de la colonisation.

Mais Netanyahou fait le pari que le coup de froid dans ses relations avec le président américain n’aura pas de conséquences sur le soutien que les États-Unis lui accordent. L’aide militaire et financière n’est pas remise en cause et Netanyahou compte patiemment attendre l’échéance électorale de 2016, en espérant voir l’élection des Républicains ou de la Démocrate Hillary Clinton, mieux disposée à l’égard d’Israël que Barak Obama.

Il peut, d’ici là, faire de vagues promesses d’ouverture de négociations ne débouchant sur rien. Il pense que les diplomaties occidentales n’iront pas au-delà des protestations verbales par rapport à sa politique.

C’est un raisonnement qui peut être payant à court terme, mais qui est catastrophique sur le long terme. En premier lieu, pour la population palestinienne qui continue de souffrir des méfaits de l’occupation et de la répression en Cisjordanie et à Jérusalem-est, du maintien du blocus et de l’absence de reconstruction après les bombardements sur Gaza de l’été 2014, mais également pour l’intérêt même d’Israël.

La reprise des violences n’est pas à exclure. Elles pourraient également concerner les Arabes israéliens qui se sentent de plus en plus discriminés, mais qui sont désormais mieux représentés au Parlement israélien. Ceux qui sont nés sur place supportent de moins en moins d’avoir un statut inférieur et d’être maltraités par des immigrants récents, venus de l’ex-Union soviétique, et très souvent ouvertement racistes.

La déclaration d’Avigdor Liberman, menaçant de décapiter les Arabes qui ne seraient pas loyaux à l’égard de l’État d’Israël, est symptomatique des dérives de la société israélienne. Ces déclarations inadmissibles n’ont guère soulevé de tempête de protestations et Avigdor Liberman devrait se retrouver au gouvernement.

Les gouvernements occidentaux restent timides ou volontairement impuissants à l’égard d’Israël. Mais un changement important s’est produit avec des sanctions commerciales prises, suite à la guerre de Gaza, par de nombreux pays latino-américains.

Si l’Inde entretient une relation bilatérale importante avec Israël, accentuée par l’arrivée du Premier ministre nationaliste, les autres pays émergents prennent leurs distances avec l’État hébreu. Celui-ci n’est plus vu comme un petit pays luttant pour sa survie mais comme un État qui occupe et réprime un autre peuple.

Le discours occidental sur la démocratie et les valeurs universelles est contredit par le soutien quasi-inconditionnel accordé à Israël. Les sociétés civiles des pays occidentaux pourraient avoir un rôle majeur pour faire pression sur leur gouvernement afin qu’ils changent d’attitude et aient, à l’égard du conflit israélo-palestinien, une attitude plus cohérente avec les principes affirmés.

Il y a de plus en plus de mobilisation pour mettre fin à une situation coloniale jugée incompatible avec les valeurs occidentales autoproclamées.
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