L'édito de Pascal Boniface

Le sport, c’est bien plus que du sport !

Édito
9 avril 2013
Le point de vue de Pascal Boniface
Le sport, élément de « soft power », de rayonnement international, pour la France ? Denis Masseglia, président du Comité International Olympique et Sportif Français (CNOSF), répond aux questions de Pascal Boniface, directeur de l’IRIS, à l’occasion du livre-entretien qu’ils viennent de publier « Le sport, c’est bien plus que du sport » (JC Gawsewitch Editeur).

Pascal Boniface : En quoi les résultats de nos sportifs sont un moyen pour la France de bénéficier d’une bonne image ? Est-ce que le sport fait partie de l’image d’un pays, de ce qu’on appelle le « soft power », la puissance douce, de plus en plus évoqué en géopolitique ? Et est-ce qu’un bilan en termes de médailles, de records, d’excellence des sportifs contribue au prestige et au rayonnement d’un pays ?


Denis Masseglia : En termes de sport, il y a deux paramètres qui interviennent. Tout d’abord, la capacité à avoir des médailles. La France se situe régulièrement entre la 6e à la 10e place mondiale, c’est presque le même niveau que celui de l’économie du pays, il y a finalement un lien assez logique. On remarquera qu’il y a parfois des changements dans les classements et que la Grande-Bretagne par exemple a obtenu à l’issue d’un bond en avant spectaculaire, la 3e place à Londres. Certes c’était à l’occasion de Jeux qu’elle organisait mais c’est bien la preuve que les résultats sportifs font partie intégrante de la communication d’une nation et de l’image de dynamisme que celle-ci peut donner. Quand on donne une image de pays qui gagne, c’est aussi qu’on a le souci que cela puisse être un élément intéressant pour l’économie du pays, pour sa culture, le tourisme, le dynamisme de la nation, le sentiment identitaire aussi. Le côté performance sportive est un vecteur de communication tant interne qu’externe intéressant pour le pays. Le deuxième paramètre qui me semble important, c’est la capacité à organiser de grandes manifestations. La France n’est pas mal de ce côté-là, mais il y a d’autres pays qui essaient d’organiser sans avoir les résultats sportifs pour aussi exister. L’exemple le plus frappant c’est celui du Qatar qui a clairement choisi le sport comme axe de notoriété et de communication.


PB : Quelle est la réalité de la compétition pour l’organisation des grands évènements ?


DM : C’est une vraie compétition parce qu’il y a un réel enjeu de notoriété et d’économie. Il faut bien se dire qu’il y a les évènements dont on parle beaucoup (Jeux Olympiques, Coupes du monde de football et de rugby, voire championnats du monde d’athlétisme ou de natation), et puis il y a aussi tous les championnats du monde de disciplines olympiques ou non, qui font aussi partie du savoir-faire, et que la France est reconnue pour celui-ci. Comme il y a une expertise, une capacité d’organisation incontestable, une qualité d’accueil lorsque l’on organise, les gens sont en général contents quand la France a l’honneur d’organiser un championnat du monde. Ceci étant, on sort aussi de quatre candidatures olympiques qui se sont soldées par un échec, parfois cuisant, parfois honorable et même parfois très proche de la réussite, qui montrent qu’on doit appréhender l’ambition olympique et l’éventuelle candidature qui y serait liée, avec précaution et en ayant bien en tête tous les paramètres qu’il faut remplir pour pouvoir réussir. C’est l’objectif de l’étude qui a été demandé à un cabinet d’expertise extérieur, à la fois commanditée par le ministère et le Comité olympique pour bien cerner, à travers les propositions qui nous seraient faites, les conditions qu’il faut remplir pour avoir le maximum de chances de succès.


Tu es favorable à une candidature sur Paris 2024 ?


DM : Je suis favorable à ce qu’on étudie les choses étape par étape. Je rejoins en cela l’analyse qu’a faite la société d’études olympiques KENEO, à savoir d’abord avoir un projet et une vision, c’est indispensable. On n’est pas candidat aux Jeux olympiques pour avoir le plaisir de l’être, mais parce que l’on a quelque chose à mettre en œuvre. Ça répond à la question : « Pourquoi être candidat ? » La deuxième question c’est « pourquoi les membres du CIO voteraient-ils Paris ? » Là aussi il faut inspirer de la confiance, il faut donc qu’il y ait au préalable des fondations qui soient installées. C’est un peu comme les murs d’une maison qu’on ne peut bâtir que si les fondations ont été faites. Les fondations, c’est avoir une gouvernance modifiée dans les relations internationales – ce qui est fait – c’est également avoir une stratégie de positionnement du mouvement sportif sur le plan international – c’est en train de se faire – et puis c’est aussi avoir les conditions requises pour être candidat. Là c’est forcément quelque chose qui ne dépend pas que de nous : il faut savoir quelle va être la ville qui sera l’organisatrice des Jeux Olympiques de 2020 et puis, puisqu’il faut forcément une co-signature entre le maire de la ville candidate et le président du Comité olympique, peut-être laisser passer les élections municipales de 2014. Il ne faudrait pas faire d’une candidature olympique un enjeu d’élections municipales.
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