L'édito de Pascal Boniface

G20, Sarkozy entre habilité et efficacité

Édito
25 janvier 2011
Le point de vue de Pascal Boniface

Dans sa conférence de presse pour lancer la présidence du G20, Nicolas Sarkozy a tenu à renouveler un exercice qu’il avait déjà pratiqué en août dernier lors de la conférence des ambassadeurs. En difficulté à l’époque sur le plan intérieur et diplomatique (sondages en berne, condamnation internationale à propos des Roms), il dégageait une vision stratégique à long terme à propos du G20. Aujourd’hui, toujours mal en point vis à vis de l’opinion française, devant faire face aux critiques sur la gestion du dossier tunisien, il propose une réforme globale du système international.

Nicolas Sarkozy s’est montré particulièrement habile en donnant l’image d’un chef d’État d’un pays soucieux de l’intérêt général, animé par une démarche multilatérale, cherchant à mettre en place les instruments de régulation afin d’éviter de nouvelles crises. Reste à voir s’il sera efficace et si ses propositions bienvenues seront mises en œuvre à l’issue de sa présidence.

Sans attaquer frontalement aucun autre pays – ce qui aurait été malvenu lorsque l’on va prendre la présidence d’une institution internationale fût-elle informelle -, Nicolas Sarkozy a déploré que les grandes puissances soient davantage occupées par leurs enjeux nationaux plus que par la coopération internationale et que de ce fait il soit difficile de dégager un consensus sur les réponses aux grands défis. Il a voulu donner l’image d’une France assez forte pour être consciente de ses responsabilités et de la capacité de proposition qu’elle peut avoir mais suffisamment modeste pour ne pas avoir l’illusion d’imposer des solutions aux autres.

Il met donc en garde contre les politiques économiques non coordonnées et la nécessité de ne pas se lancer dans des politiques de dévaluations compétitives. Il propose une vaste réforme du FMI par le doublement de son capital et la modification de la répartition du pouvoir. Il prend acte de la multipolarisation du monde. Faisant un geste à l’égard des plus démunis, se dit soucieux d’assurer la sécurité alimentaire pour éviter de nouvelles émeutes de la faim.

Sa proposition d’associer l’Allemagne et le Mexique dans une coprésidence collective du G-20 montre que la France est sensible aux accusations d’arrogance qui lui ont été souvent faites dans le passé. Les dirigeants chinois, russes et anglais sont également associés à l’exercice.
Pour réussir, il est indispensable de faire accepter ses propositions par les autres pays et de donner le sentiment de jouer collectif. L’égoïsme des grandes puissances n’est, non seulement plus acceptable, mais inefficace à l’heure de la multipolarisation. Dans le même ordre d’idées, il réitère son engagement en faveur de l’élargissement du Conseil de sécurité qui verrait accueillir de nouveaux membres permanents issus du continent africain et sud-américain avec l’Inde, l’Allemagne et le Japon. Il propose de taxer les transactions financières internationales, à la fois afin de lutter contre la spéculation et trouver de nouvelles aux sources pour le développement. Il propose également un code de conduite en matière de gestion des fluides capitaux et de donner plus de poids à l’Organisation internationale du travail.

Tout ceci constituera en effet une réforme judicieuse du système international. Nicolas Sarkozy, qui avait réussi la présidence de l’Union européenne lors du second semestre 2008, peut-il espérer renouveler cela ? Les Français sont sensibles au rôle de la France sur la scène internationale. Ce ne sont pas les questions diplomatiques qui sont prioritaires pour les électeurs mais dans un scrutin serré, elles peuvent faire la différence. Si Sarkozy réussit son G20, il peut espérer en tirer un bénéfice électoral pour 2012. Les thèmes qu’il propose, très progressistes, sont populaires en France.

Il n’obtiendra bien sûr pas satisfaction sur tout. Peut-être sur pas grand-chose. Il faudra alors convaincre les électeurs, soit que ses résultats sont déjà estimables, soit que la France a joué collectif et que ce sont les égoïsmes nationaux des autres pays qui ont empêché la victoire.
 


 

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