L'édito de Pascal Boniface

Les enjeux du vote de l’ONU sur la Palestine

Édito
16 septembre 2011
Le point de vue de Pascal Boniface

Le 20 septembre, l’Assemblée générale des Nations Unies va se prononcer sur l’admission de la Palestine. Ce vote très attendu, fait depuis plusieurs semaines, voire plusieurs mois, l’objet d’une intense bataille diplomatique. Il n’aura pourtant aucun effet concret immédiat.

Tout d’abord parce que la décision finale appartient au Conseil de Sécurité et les États-Unis ont d’ores et déjà annoncé qu’ils mettraient leur veto. Par ailleurs, quelle que soit l’issue du vote, la situation concrète ne changera pas : les Territoires palestiniens continueront d’être occupés par l’armée israélienne.
Si le vote n’aura aucune signification sur le terrain, il est de la plus haute importance politique et symbolique. Sinon il ne mobiliserait pas à ce point les énergies des différentes diplomaties.

Du côté palestinien, cette stratégie diplomatique est la confirmation de l’échec de l’Intifada armée mais également l’impasse des négociations bilatérales avec Israël. Côté israélien, sans remettre ouvertement en cause la perspective de la création d’un État palestinien, s’opposent fermement à l’admission de la Palestine à l’ONU. Ils affirment que cela mettrait en danger le processus bilatéral de négociations. Ils craignent surtout que cela montre leur isolement au niveau international. Les États-Unis reprennent la même argumentation. Netanyahou a reçu un accueil triomphal devant le Congrès cet été. Barak Obama, déjà en difficulté sur le plan politique, ne veut pas prendre le risque de compromettre sa réélection en 2012 à cause du dossier du Proche-Orient.

Dire qu’un vote à l’ONU va mettre en danger les négociations bilatérales est une plaisanterie, pour employer un euphémisme. Celles-ci ne débouchent sur rien et ne semblent n’être qu’un écran de fumée pour gagner du temps et conforter des positions de faits accomplis en faveur d’Israël.

Les Européens sont divisés. Ils sont tous attachés à la notion des deux États. Mais l’Allemagne reste tétanisée par rapport à Israël, les Pays-Bas également, la Pologne et la Tchéquie continuent de déterminer leur position par rapport à celle de Washington. Il est donc peu probable qu’il y ait une affirmation forte et commune de la part des Européens. Le risque de voir leur vote être réparti entre le oui, l’abstention et le non, ne peut être exclu. Cela est peu glorieux pour une Europe qui se veut un acteur global et qui est, par ailleurs, le premier partenaire commercial d’Israël et le premier contributeur d’aide à l’Autorité Palestinienne. C’est également un recul historique quand on se rappelle qu’en 1980, la déclaration de Venise portant sur le Proche-Orient a été la première position commune et forte des pays européens sur un sujet stratégique.

Le vote va surtout montrer l’isolement d’Israël – et donc indirectement des États-Unis – et le fort soutien à la création d’un État palestinien. Ce soutien ne saurait être réduit aux seuls pays arabes ou musulmans. L’immense majorité des pays du Sud et les grandes démocraties émergentes sont sur la même position.

Les rapports de force internationaux sont modifiés par la perte du monopole de la puissance du monde occidental et par la montée en puissance des pays émergents. Cette modification structurelle des rapports de force ne joue pas en faveur d’Israël.

Ne rien céder en tablant sur la protection américaine n’est pas viable à moyen terme.
 


 

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