L'édito de Pascal Boniface

 Crash du vol MH17 : derrière le drame, comment Poutine peut clore la crise en Ukraine

Édito
22 juillet 2014
Le point de vue de Pascal Boniface
 L’implication de plus en plus probable des indépendantistes ukrainiens pro-russes dans le tir du missile qui a abattu un avion de la Malaysia Airlines constitue un tournant dans l’actuel conflit ukrainien.

Cette tragédie peut conduire à son aggravation, mais peut également être une opportunité pour offrir une sortie de crise, qui permette aux dirigeants de Kiev, de Moscou et des pays occidentaux d’en sortir la tête haute s’ils jouent intelligemment.


Les indépendantistes pro-russes ont montré leur irresponsabilité et leur dangerosité. Un tel crime (même s’il s’agit d’une erreur de cible) ne peut rester impuni. Poutine doit donc prendre réellement ses distances avec les indépendantistes pro-russes. Il avait commencé à le faire de façon limitée, il doit désormais aller plus loin. Il faut qu’il les force à accepter ses conditions ou qu’il les lâche totalement. Il doit cesser de les aider militairement. Il ne peut plus les soutenir ou accepter qu’ils se revendiquent de lui.

Les nouvelles autorités de Kiev doivent pouvoir recouvrer leur intégrité territoriale dans l’est du pays, la Crimée restant à part. Cela implique la reconquête de Donestk, qui ne peut se faire après des combats dont les effets seraient terribles pour la population civile, mais après un accord politique. C’est là que Poutine doit mettre tout son poids pour que les indépendantistes pro-russes n’aient d’autre choix que de l’accepter. Ou n’avoir pas les moyens de s’y opposer.

Mais si on veut que la population est-ukrainienne accepte facilement cette réunification il faut que les dirigeants de Kiev leur offre des garanties politiques et culturelles. Il ne doit pas y avoir d’esprit de triomphe ou de revanche sur eux. Une fédéralisation du pays doit être la perspective.

Il est également nécessaire que Barak Obama n’essaie pas de compenser à l’égard de Poutine la fermeté qu’il lui est reproché de ne pas montrer sur d’autres dossiers. Il ne doit pas chercher sur ce dossier à balayer les accusations de procrastination qui lui sont adressées. Or ses promesses de début de premier mandat d’appuyer sur le bouton "reset" dans les relations internationales avec Moscou ont vite été oubliées.

Certes Poutine n’est pas un interlocuteur facile, mais Washington doit cesser de voir dans la Russie un pays vaincu de la Guerre froide dont on peut négliger opinions et intérêts.

L’Ukraine a besoin d’avoir des relations avec le monde occidental et la Russie. Son intérêt n’est pas dans le choix d’un partenariat unique.

Ni les États-Unis, ni les pays européens n’ont la volonté et la capacité d’aider suffisamment l’Ukraine pour qu’elle puisse avec cette seule aide se sortir des difficultés économiques qui sont les siennes. Les Européens ont un rôle important à jouer pour que la réunification ukrainienne ne soit pas présentée comme une défaite pour la Russie qui appellerait une revanche ultérieure.
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