ANALYSES

Forum des sports de l’Union européenne 2014 : la politique sportive européenne au milieu du gué

Tribune
8 décembre 2014

Le Forum des sports de l’Union européenne (organisé par la Commission européenne) s’est tenu le 1er décembre 2014 à Milan. Cet événement annuel réunit les principaux acteurs du sport européen et est censé rapprocher les institutions de la société civile (l’événement est pourtant passé inaperçu pour ceux qui ne sont pas déjà impliqués dans le sport au niveau continental).


Le Forum a surtout permis au nouveau commissaire en charge des questions sportives, le hongrois Tibor Navracsis, d’annoncer ses priorités. Il en a donné trois : revenir à la promotion du sport pour tous (il a répété plusieurs fois l’importance de créer et renforcer les communautés du sport – « communities »), lutter contre les dérives qui compromettent l’image et l’intégrité du sport (corruption, dopage, problème des agents de joueurs) et promouvoir l’impact du sport sur l’économie et les emplois. Il en a également profité pour rencontrer les hautes autorités sportives du continent et officialiser les préparations de la première semaine européenne du sport qui aura lieu en septembre 2015.


Une session était dédiée à la lutte contre les matchs truqués, pendant laquelle l’IRIS a été invitée à présenter les résultats du programme européen mené ces deux dernières années. L’IRIS a présenté ses cinq recommandations dans la lutte contre la corruption au niveau national : application de campagnes de sensibilisation et d’un code disciplinaire anti-corruption au sein des principales fédérations sportives nationales, nomination d’un référent intégrité au sein de chacune de ces fédérations, coopération approfondie entre autorités sportives et opérateurs de paris sportifs légaux, limitation des risques de fraude au sein du marché des paris sportifs, constitution d’une plateforme ou taskforce nationale pour coordonner les efforts nationaux et servir de point de contact. Au niveau européen, l’IRIS a également convié la Commission européenne à promouvoir la Convention du Conseil de l’Europe contre la manipulation des rencontres sportives qui a été ouverte à signature en septembre cette année (ce qu’elle n’a pas encore fait).


En finançant plusieurs programmes et études dédiés à la lutte contre les trucages, la Commission européenne montre son intérêt à la protection de l’intégrité sportive, même si son champ d’action reste marginal, le mouvement sportif gardant la mainmise sur sa régulation (l’accord de coopération UEFA-Commission signé en octobre le confirme). Pourtant, au regard des dérives récentes (pots-de-vin, malversations sur les transferts, blanchiment d’argent), on peut constater que l’autorégulation ne fonctionne pas. C’est pourquoi il serait souhaitable que les autorités publiques s’investissent de façon plus franche dans le sport. Le mouvement sportif lui-même a d’ailleurs appelé les États à signer la Convention du Conseil de l’Europe pour l’assister dans la prévention et la répression des fraudes.


Aspect intéressant, une partie du Forum européen était consacrée à l’impact économique et social des grands événements sportifs, question d’actualité puisque se tiendra très prochainement une session extraordinaire du CIO à Monaco, où sera abordée la soutenabilité des JO et la réforme des procédés de candidatures. En attendant les orientations du CIO, et alors que la France et l’Allemagne s’apprêtent éventuellement à s’affronter pour l’organisation des Jeux 2024, pourquoi ne pas réfléchir à une coordination et une solidarité européenne sur les candidatures olympiques ? Berlin soutiendrait Paris 2024 puis Paris soutiendrait Berlin 2032, ou inversement. Autre possibilité : les pays candidats ne pourraient-ils pas bénéficier d’une expertise européenne, voir un soutien financier, sur les candidatures ? Il s’agirait par exemple d’améliorer le caractère « durable » de leurs événements, ce qui pourrait par ailleurs donner du cachet aux candidatures européennes.


On le voit, le sport ne manque pas de sujets sur lesquels une contribution européenne serait pertinente. Reste que les institutions ne jouent pas encore pleinement le rôle d’appui conféré par le Traité de Lisbonne.

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