Les politiques migratoires européennes, à la frontière du droit

  • Paul Chiron

    Paul Chiron

    Juriste en centre de rétention administrative

Union européenne a contribué à l’instauration de la paix, à la réconciliation, à la démocratie et aux droits de l’homme ». Ce sont par ces mots que Thorbjoern Jagland, président du Comité Nobel a annoncé l’attribution du Prix Nobel de la Paix à l’Union européenne (UE) en octobre 2012. Cette haute distinction venait récompenser un projet synonyme de paix et de démocratie et saluer la contribution de l’UE en faveur des droits de l’homme. Cinq années plus tard, l’UE fait face à une crise existentielle, une crise de ses valeurs. Depuis 2015, le continent européen est confronté à une arrivée importante de migrants qualifiée, tort ou à raison, de « crise migratoire ».

La migration est un élément clef de l’histoire des Européens, tantôt émigrés, tantôt immigrés. Les mouvements de populations ont façonné la société européenne mais depuis quelques années et au fil des arrivées et des drames, l’immigration est devenue un sujet proéminent dans les débats ; et la question a rapidement été récupérée politiquement, devenant par la même un enjeu électoral incontournable. Légalement, l’asile est un droit qui s’appuie sur de nombreux textes internationaux, notamment la Convention de Genève de 1951 relative au statut des réfugiés. Mais moralement, l’asile est aussi un devoir. C’est cela que l’UE semble avoir oublié, elle qui représente un idéal de paix et de stabilité.

La gestion des flux migratoires est le grand défi du XXIème siècle. La libre circulation, non seulement des marchandises et des capitaux mais aussi des hommes est par exemple l’une des pierres angulaires de la construction européenne. Cependant, cette facilitation des mouvements humains est un trompe l’œil : elle concerne avant tout les flux humains intra-occidentaux et ne s’applique que très faiblement aux mouvements du Sud vers le Nord, encouragés, entre autres, par le facteur climatique.

L’UE ne peut ni rester spectatrice des bouleversements géopolitiques, ni rester de marbre devant la multiplication des drames à ses portes. Pourtant, les politiques migratoires européennes mises en place semblent pour l’heure incapables de répondre à la crise migratoire, contribuant davantage à la multiplication des drames en mer et aux violations des droits fondamentaux des hommes et des femmes venant chercher refuge en Europe, qu’à leur diminution. Alors que la Commission européenne (CE) a proposé un nouvel agenda ayant pour ambition de redonner un nouveau souffle à la politique migratoire européenne, il semble important de s’arrêter sur les politiques actuelles afin de mieux appréhender les évolutions proposées par la Commission…