La géopolitique du code sacré : IA religieuses, soft power et sharp power spirituel

  • François Mabille

    François Mabille

    Chercheur associé à l’IRIS, directeur de l’Observatoire géopolitique du religieux

L’entrée des religions dans l’ère de l’intelligence artificielle n’est pas une simple évolution technologique : elle constitue un changement de régime du croire, de la médiation et du pouvoir symbolique. Ce que les traditions religieuses appelaient jadis « parole révélée » se trouve désormais traduit, segmenté, entraîné puis répliqué dans des architectures computationnelles. À travers ce processus, la foi devient une donnée, le texte sacré un corpus, et la prière une requête formulée à une interface.

On assiste à la montée d’une gouvernance algorithmique du sacré, où l’autorité spirituelle se transpose dans la fiabilité du code et la légitimité de l’interface. Ce que l’on nommera la « géopolitique du sacré codé » désigne donc l’ensemble des dispositifs, des acteurs et des stratégies par lesquels les États et les institutions religieuses cherchent à contrôler la circulation du sens dans l’espace numérique mondial. Elle engage une triple problématique : celle de la puissance (soft et sharp power religieux), celle de la sécurité (guerre cognitive et désinformation spirituelle), et celle de la souveraineté (qui contrôle les architectures du
croire ?).