Les « Mères du samedi » : mémoire et résistance face à l’impunité en Turquie

  • Lucie Laroche

    Lucie Laroche

    Autrice de « Mères en quête de justice. De la Turquie à l’Iran : résister à l’oubli »

« Le verre est tombé au sol – Ma main, ma main est couverte de sang – Viens à moi, viens à moi maman – Deux policiers de chaque côté de moi – Mes mains sont menottées – Trouve-moi, trouve-moi maman », sont une partie des paroles, traduites en français, de la chanson Beni Bul Anne, Trouve-moi Mère, écrite par le célèbre artiste turc, Ahmet Kaya. Bien que cette chanson soit aujourd’hui familière à la plupart des turcs, beaucoup ignorent qu’elle a été composée en hommage aux « Mères du samedi ». Ce mouvement est né en 1995 pour dénoncer les disparitions forcées des années 1980-1990, où des personnes étaient enlevées
ou détenues par les autorités ou avec leur complicité, puis portées disparues sans aucune information sur leur sort. Bien que ce mouvement fasse face à de nombreuses pressions, il continue de se réunir depuis près de 30 ans chaque samedi sur la place Galatasaray à Istanbul pour honorer la mémoire des disparus et exiger justice. Les « Mères du samedi » ou Cumartesi Anneleri en turc, demeurent donc un symbole de résilience face à l’oubli, prouvant que non seulement la Turquie est loin d’être en paix avec sa mémoire, mais que l’État de droit y demeure précaire.