Quel est le climat autour du prochain sommet de l’OTAN les 24 et 26 juin prochain à La Haye ?

On sait qu’il sera très court. Les décisions principales sont déjà prises ou en voie de l’être. Une incertitude majeure : Donald Trump viendra-t-il ? Ce serait un message fort. S’il ne vient pas, cela montre que l’OTAN n’est pas prioritaire pour lui. Et quand on voit qu’il vient d’annoncer une réunion entre ses équipes et celles de Xi Jinping qui s’est rapproché de Vladimir Poutine… On comprend bien que le vrai sujet, pour lui, ce n’est pas l’unité de l’Alliance, mais la négociation directe avec les Russes.

Quelles sont les mesures jugées prioritaires, notamment en matière de défense aérienne et de missiles à longue portée ?

Les priorités sont claires : défense aérienne et antimissile, renseignement, commandement, logistique. Il faut se préparer à un conflit de haute intensité, en particulier contre une puissance comme la Russie. Certaines capacités, notamment les frappes dans la profondeur, sont aujourd’hui presque exclusivement américaines. Si les États-Unis se désengagent partiellement, il faudra combler ces vides.

L’absence du secrétaire américain à la Défense, Pete Hegseth, pourrait-elle également changer la dynamique de soutien à l’Ukraine au sein de l’OTAN ?

Entre autres, même si cela fait quelque temps déjà que les États-Unis se mettent en retrait. Lors de la dernière réunion de Ramstein, chargée de coordonner le soutien militaire à l’Ukraine, les Américains étaient déjà peu présents. Désormais, ce sont les Européens qui tiennent surtout la coordination.

Quels sont les principaux objectifs capacitaires que l’OTAN a prévu d’adopter lors de la réunion préparatoire jeudi dernier ?

D’abord, les nouveaux plans de défense de l’OTAN, et donc les capacités qu’il faudra mettre en œuvre pour les rendre crédibles. Est également abordé la proposition de porter les dépenses militaires des États membres de l’Alliance à 3,5 % du PIB, voire 5 % selon les suggestions américaines.

Quelle est la position française sur la hausse des dépenses de défense ?

On n’a pas le choix, donc on dit oui. Mais avec réserve. Passer à 3,5 % du PIB d’ici 2032, c’est peu réaliste pour nous. On n’a pas les moyens. Ce que la France dit, c’est : « D’accord, mais utilisons cet argent intelligemment ». Comme l’ont dit les Allemands, le vrai sujet, c’est moins le pourcentage que la capacité réelle sur le terrain.

La Chine a vivement réagi aux prises de position européennes sur Taïwan. Faut-il y voir un tournant stratégique pour l’OTAN ?

Emmanuel Macron a effectivement comparé, maladroitement à mon avis, la situation en Ukraine et celle à Taïwan. La Chine a réagi en disant que l’OTAN n’était pas la bienvenue dans la région. Mais ce n’est pas la même situation. Pour la Chine, Taïwan, c’est la Chine. Et même si la Corée du Nord, qui est proche de la Chine, fournit des armes à la Russie, cela ne rend pas l’implication militaire de l’OTAN en Asie légitime. Ce serait dangereux : cela renforcerait l’idée d’un conflit global « Occident contre le reste du monde ». Et franchement, il faut éviter ça. On rappelle que le rôle de l’OTAN, c’est la sécurité de l’espace euroatlantique.