Donald Trump affirme vouloir une résolution durable du conflit au Moyen-Orient, pas juste un cessez-le-feu. Selon vous, est-il sincère dans sa démarche diplomatique ?
Honnêtement, il est très difficile de savoir ce que pense réellement Donald Trump. Il dit souvent tout et son contraire. À certains moments, j’ai cru à sa volonté de négocier avec l’Iran. Il a répété qu’il ne voulait pas la guerre. Mais dans les faits, il laisse Israël attaquer, ce qui complique les négociations. Il y a une grande ambiguïté.
Donald Trump aurait pu empêcher l’attaque israélienne s’il l’avait voulu ?
Absolument. Il avait les moyens de dire à Netanyahu de ne pas lancer d’offensive. Le fait qu’il ne l’ait pas fait montre que, peut-être, il ne cherche pas une vraie négociation. Il semble vouloir mettre l’Iran à genoux, obtenir une sorte de reddition : plus d’enrichissement d’uranium, plus rien. Ce n’est pas une négociation.
Le programme nucléaire iranien est donc au cœur de la crise ?
Oui, mais il est souvent caricaturé. On entend partout que « l’Iran ne devra jamais avoir la bombe », alors que ce pays a signé le traité de non-prolifération nucléaire, contrairement à Israël. Il faut rappeler l’histoire : l’Iran a abandonné la militarisation de son programme en 2003, selon tous les services de renseignement. L’accord de 2015 encadrait strictement l’activité nucléaire iranienne. Mais Donald Trump a quitté l’accord sans raison. Depuis, l’Iran a repris progressivement ses activités, faute de soutien européen.
Où en est l’enrichissement d’uranium en Iran aujourd’hui ?
Ils sont passés de 3,7 % (comme prévu par l’accord) à 60 %. Deux hypothèses existent : soit ils mettent la pression pour renégocier, soit ils veulent devenir une « puissance du seuil », comme le Japon ou l’Allemagne, c’est-à-dire pouvoir fabriquer une bombe rapidement sans l’avoir encore. Mais à ce jour, tous les services secrets s’accordent : l’Iran n’a pas entamé la phase de militarisation.
Donald Trump a quitté prématurément le G7 pour gérer la situation. Est-ce un signe fort ?
Peut-être un coup de communication. Donald Trump est imprévisible, mais très habile en image. Ce geste peut viser à montrer qu’il tient les rênes, qu’il pilote la crise. Mais derrière, la réalité reste floue : négocie-t-il vraiment ou prépare-t-il une solution militaire ? La seule certitude, c’est que son ambiguïté inquiète.
Le président américain peut-il vraiment se présenter comme médiateur dans ce conflit ?
Non. Il a détruit l’accord de 2015, laisse Israël attaquer, multiplie les signaux contradictoires. Les Iraniens le savent. Mais paradoxalement, ils n’ont pas le choix : s’ils veulent éviter la destruction du pays, ils doivent traiter avec les États-Unis. Pas parce qu’ils sont médiateurs, mais parce qu’ils sont les seuls à pouvoir arrêter l’escalade.
Y a-t-il un risque réel d’engagement militaire direct des États-Unis ?
Je n’y crois pas trop. Les Iraniens sont calculateurs. Ils évitent soigneusement de s’en prendre aux bases américaines. Ce serait donner un prétexte à Washington pour entrer dans le conflit. Et ils savent qu’une guerre ouverte les affaiblirait beaucoup. Ils préfèrent rester sur un affrontement régional maîtrisé, en jouant la carte diplomatique avec les pays musulmans.