• Romuald Sciora

    Chercheur associé à l’IRIS, directeur de l’Observatoire politique et géostratégique des États-Unis

A la différence de ce qu’on a pu voir auparavant, les deux partis ne sont plus si éloignés, notamment en ce qui concerne l’Ukraine. Les deux lignes, interventionnistes et non-interventionnistes, se rejoignent sur l’attitude à adopter face au conflit. La guerre doit prendre fin le plus rapidement possible, sans intervention américaine.

En février 2022, lors de l’invasion de l’Ukraine, Volodymyr Zelensky avait demandé la création d’un pont aérien qui aurait rendu toute attaque contre des civils condamnable par l’OTAN. Une politique soutenue par les faucons.

En septembre 2022, alors que l’Ukraine était prête à négocier, l’administration Biden avait refusé, assurant à l’Ukraine que les États-Unis la soutiendraient jusqu’au bout. Les faucons parlaient même d’une possible intervention terrestre américaine.

Les choses ont commencé à changer à partir de 2023. La contre-offensive ukrainienne n’a pas fonctionné et il était évident que l’Ukraine avait perdu la guerre. Avec le retour de Donald Trump, les faucons républicains se sont tus. Et lors de la campagne présidentielle, ils se sont alignés derrière Donald Trump.

Depuis 2023, ils auraient dû, Marco Rubio en tête, batailler pour que les États-Unis soient présents militairement en Ukraine et surtout pour qu’ils ne traitent pas avec Vladimir Poutine.

S’ils se sont alignés sur la politique présidentielle, c’est tout simplement par opportunisme politique. On peut dire sans se tromper que les faucons américains se sont aplatis devant Trump, qui lui-même s’aplatit devant Poutine. Il reçoit Vladimir Poutine sur un tapis rouge, accède à la plupart de ses demandes et le traite comme un ami.

Donald Trump a été très clair depuis le départ. Il a promis de mettre fin à la guerre en Ukraine « en 24 heures », le plus rapidement possible. Et c’est ce qu’il a cherché à faire, sûrement avec succès, lors des discussions avec le dirigeant russe.

Ce à quoi nous avons assisté samedi est historique. C’est une défaite considérable pour l’Occident. En octobre 2024, Volodymyr Zelensky, soutenu par ses alliés occidentaux, demandait la restitution de tous les territoires, y compris la Crimée, et la destitution de Poutine. Toute concession faite après avoir mis la barre si haut est forcément une défaite.

De plus, cette réunion a achevé de mettre fin au multilatéralisme. L’ONU est absente des négociations et c’est le retour d’un monde bilatéral.

Propos recueillis par Louise Deshautels pour La Dépêche.