ANALYSES

« L’opinion acceptera-t-elle que la France risque la vie des otages ? »

Presse
27 décembre 2012
Philippe Hugon - La Nouvelle République
Que cachent les blocages supposés dans les négociations ?

La difficulté, c’est que les interlocuteurs ne sont pas stabilisés. Je ne suis pas sûr que les ravisseurs aient tous les mêmes objectifs. Certains sont mercantiles et veulent avant tout une rançon, d’autres ont des visées politiques et utilisent les otages comme un moyen de pression, notamment pour tenter d’empêcher l’intervention militaire de l’ONU au nord Mali. Ceux-là n’ont vraiment pas intérêt à exécuter les otages.


Et du côté français?

La France a aussi une position délicate, car elle est très présente dans l’opération qui se prépare au Nord-Mali. Est-ce que l’opinion acceptera que le gouvernement risque ainsi la vie des otages ? On sait bien que la libération d’otages est toujours considérée comme une victoire pour un camp politique. D’un autre côté, la France a de nombreux liens historiques avec le Mali et le Sahel. Ce sont des pays francophones, avec lesquels elle entretient des relations privilégiées. Si cette région devient un nouvel Afghanistan, ce serait très grave.


Une surenchère entre les groupes islamistes peut-elle gêner les négociations?

Oui. Le terrain est très évolutif et très miné dans cette région et nous ne savons pas quels sont les liens entre les différentes mouvances comme Boko Haram, Mujao, etc. Il est d’ailleurs étonnant que François Hollande ait d’abord parlé d’Aqmi lorsqu’un Français s’est fait enlever le 20 novembre au Mali, alors qu’il s’agissait de dissidents de Boko Haram. Le jeu d’alliances est très complexe. Les otages ont très bien pu être revendus, soit pour des raisons financières, soit parce que les preneurs d’otages sont obligés de changer régulièrement de position pour ne pas être repérés.


Existe-t-il un risque pour les Français dans cette région ?

Bien sûr. Aqmi et d’autres groupes ont prévenu que tant que la France soutiendra l’intervention militaire au Mali, d’autres enlèvements pourraient avoir lieu. Nous avons connu la même situation en Afghanistan.

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