Plaidoyer pour la formation des élites européennes ou comment l’Europe peut-elle se prémunir de l’ingérence chinoise ?

  • Emmanuel Lincot

    Emmanuel Lincot

    Directeur de recherche à l’IRIS, co-responsable du Programme Asie-Pacifique

  • Emmanuel Véron

    Emmanuel Véron

    Docteur en géographie et sinologue, associé à l’École navale et à l’UMR IFRAE (INALCO)

La crise du Covid-19 est un accélérateur des tendances du système international (délitement du multilatéralisme, montée en puissance des plateformes numériques, concurrence des États-puissances, la compétition plus que la coopération, crispations exacerbées entre l’Occident et la Chine, la Russie et la Turquie) marquant un tournant et confortant Bruxelles dans la nécessité de rééquilibrer son partenariat avec la Chine ; ce « rival systémique » comme les dirigeants européens la qualifie désormais. Mensonges du régime chinois sur le nombre réel de victimes de la pandémie, dissimulation structurelle conférant à l’amnésie d’État, réécriture de l’histoire (soutenue par l’hypermnésie sélective), agressivité de ses diplomates et pressions exercées par Pékin sur les instances internationales onusiennes auront fait apparaître au grand jour la naïveté des Européens à l’égard d’une dictature qui n’en reste pas moins incontournable dans les affaires du monde. Cette période charnière a également permis de mettre le doigt sur les carences d’un système néo-libéral et la nécessité pour les États européens de mieux se protéger et de se coordonner. Retour à la souveraineté donc avec un découplage industriel qui mettra du temps certes, mais qui n’en est pas moins déjà amorcé. Toutefois, un autre aspect doit être privilégié par les Européens : celui de l’information, de son contrôle, de l’ingérence (polymorphe) et de l’intoxication, mais encore de la formation des élites dirigeantes européennes dans tout ce qui a trait aux affaires chinoises du Parti-État. Enfin, dans le souci de préserver un avenir en partant du postulat qu’il y a sans doute plus d’intelligence à échanger entre deux très anciennes civilisations (l’Europe et la Chine) sur les défis à venir (le changement climatique, l’urbanisme, la biodiversité, la consommation énergétique, la santé, la consommation alimentaire…) …