La revalorisation du continent européen en formule 1 : quelle marge de manœuvre pour Liberty Media ?

  • Jérémie Gauthier

    Jérémie Gauthier

    Diplômé d’IRIS Sup’

Quand on voit ce qu’il s’y fait en termes d’organisation, je considère que l’Europe est devenue une partie du tiers-monde », estimait Bernie Ecclestone en novembre 2014 afin de pointer l’insuffisance des infrastructures proposées en marge des Grands Prix européens et la faible plus-value financière que ces derniers apportent aux revenus de la F1 globalisée. Les chiffres sont révélateurs : en 1998, sur 16 manches disputées, 11 étaient européennes (soit 69%) ; en 2018, sur 21 manches, seulement 9 se sont déroulées sur le Vieux Continent (soit 43%).

La F1 a donc progressivement quitté son berceau européen pour s’exporter dans le reste du monde, notamment vers le continent asiatique. Cependant, la politique promotionnelle développée par l’ancien propriétaire de la F1, CVC Capital Partners, et sa figure de proue Bernie Ecclestone, consistant à exiger des franchises colossales à des métropoles émergentes friandes de visibilité internationale, montre ses limites. En moyenne quatre fois plus élevées que dans les pays d’accueil européens, ces franchises, combinées aux coûts d’organisation d’un Grand Prix, rendent difficile la rentabilisation par les hôtes (privés ou publics), d’autant plus que les tribunes de la plupart des circuits asiatiques demeurent clairsemées. Sur ces nouvelles destinations, 4 ont disparu faute de popularité locale et de rentabilité (Turquie en 2011, Inde et Corée du Sud en 2013, Malaisie en 2017), alors que 3 autres restent dans une situation économique précaire (Chine, Bahreı̈n, Azerbaı̈djan). Surtout, les franchises exorbitantes perçues par la Formula One Management (FOM) en Asie ont participé à la précarisation des Grands Prix européens, pourtant populaires et historiques. Les exigences organisationnelles de plus en plus coûteuses de la discipline (caractérisées par le dynamisme de métropoles émergentes désireuses de tourisme international, d’urbanisation accélérée et de publicité), ainsi que la valeur financière colossale du plateau de la F1, ont progressivement mis à mal plusieurs courses européennes ne pouvant plus couvrir les frais croissants…