Notes / Asia Focus
5 juillet 2018
Quelle place pour l’Inde face au projet OBOR ?

L’incident prend place le 28 août dernier dans la chaîne himalayenne, sur le plateau de Doklam (mandarin : Donglang), zone de jonction entre le Bhoutan, la Chine et l’Inde. Pour la première fois depuis 1987, l’équivalent d’un bataillon de militaires indiens franchissent la frontière pour engager les forces de l’Armée populaire de libération (APL) et détruire là où ils le peuvent les ébauches d’une nouvelle route en cours de construction. Pour sa défense, l’Inde affirme que ce projet représente une claire violation des divers traités signés avec Pékin depuis les années 1970. La réponse de cette dernière ne se fait pas attendre : tambours battants, une campagne médiatique au vitriol est menée pour fustiger le comportement de New Delhi, les autorités chinoises allant jusqu’à promettre une ‘courte guerre’ et des pertes encore plus douloureuses que celles infligées lors du conflit de 1962. Bien heureusement, cette rhétorique martiale ne sera pas suivie d’effets : forcées de faire bonne figure à quelques jours du sommet des BRICS, les deux capitales trouveront finalement un accord permettant à chacun de sauver la face auprès de l’opinion publique… le tout en évitant bien sûr de trouver une solution durable au problème du Doklam. Cet événement local est en réalité symptomatique des relations qu’entretiennent l’Inde et la Chine à une échelle plus globale, et depuis plusieurs années déjà. Derrière ce raid des forces indiennes se laisse en effet clairement percevoir l’inquiétude du gouvernement Modi face au développement gargantuesque des intérêts de la République populaire de Chine (RPC) dans son voisinage, inquiétude que l’on peut considérer comme fondée d’un point de vue indien alors que Pékin concrétise chaque jour un peu plus son Initiative ‘One Belt One Road’ (OBOR). Par souci d’éviter de trop nombreuses digressions, nous nous concentrerons ici sur les trois projets les plus pertinents, à savoir le CPEC (China Pakistan Economic Corridor) qui relierait le Sinkiang à l’Océan Indien via le port de Gwadar, la route de Kunming qui relierait l’Empire du Milieu au Bangladesh, et enfin l’axe maritime se situant entre ces deux ports, axe qui pourrait à terme aisément rivaliser avec les ports de Mumbai, Goa ou Gujarat…