Notes / Asia Focus
15 juin 2023
Tour d’horizon du paysage géopolitique en Asie-Pacifique

EMMANUEL LINCOT : Nombre d’États revendiquent, une gouvernance mondiale plus polycentrique, et moins occidentalocentrée. On pense à la Russie, mais aussi, et surtout à la Chine. Pour autant, ces États sont-ils en mesure de donner une véritable alternative au système international tel que nous le connaissons depuis 1945, et auquel la Russie comme la Chine, malgré leurs critiques, ont contribué ?
DAVID CUMIN : De nos jours, l’Occident est moins dominant qu’héritier de son ancienne domination. Après les Grandes Découvertes, « l’occidentalisation » fut conquête ou expansion coloniale, en deux temps, XVIe-XVIIIe siècles, XIXe-XXe. Puis elle fut acculturation, c’est-à-dire diffusion et imitation d’idées, institutions, technologies, styles de vie, également en deux temps, à l’époque coloniale et à l’époque décoloniale. De nos jours, l’Occident garde la faculté d’intervenir ou non, celle d’accorder ou de refuser l’asile. C’est l’Occident qui projette ses forces outre-mer et qui revendique le droit d’ingérence, et c’est vers l’Occident, pourtant accusé, que se dirigent les persécutés ou que se tournent les révoltés, les autres puissances insistant, elles, sur la non-ingérence. C’est encore l’Occident qui rédige les métarécits internationaux : ce que Karoline Postel-Vinay appelle la « puissance narrative ». Le déclin relatif de l’Europe après 1918 a été compensé, d’abord, par la montée de l’Amérique, remplaçant l’Europe, ensuite, par la « victoire froide » sur l’URSS et la mondialisation des modèles occidentaux. Le XXe siècle a continué l’hégémonie de l’Occident, dont le centre de gravité se trouvait déplacé outre-Atlantique. Le XXIe siècle verra-t-il le déclin de l’Occident ? …