Notes / Observatoire géopolitique du religieux
10 février 2016
Quelles politiques publiques en matière religieuse en Europe ?

Si le facteur religieux est une constante des interrogations européennes, c’est bien parce qu’il est à la charnière des appartenances individuelles, des identités collectives et des politiques publiques. Cependant, l’extrême hétérogénéité du rapport au religieux sur le continent européen, non seulement en raison d’héritages historiques variés, de la fragmentation confessionnelle, mais à cause aussi de la constante fragilité des frontières de l’Europe appelle la question des politiques publiques à l’échelle régionale de notre continent. Le sujet pourrait paraître aisé, mais comme sur bien d’autres, la fameuse « marge d’appréciation des États » que Bruxelles et ses institutions reconnaissent, fragilise l’émergence d’une pratique uniforme. En effet, que ce soit l’Europe de l’Union européenne (28 États) ou celle du Conseil de l’Europe (47 États), le fait religieux reste avant tout le champ d’action des États membres. Ce principe de souveraineté nationale applicable aux questions religieuses, que ce soit en matière de rapport au politique (France), de visibilité symbolique (Italie), de coopération sociale (Grèce), de gestion centralisée du fait religieux (Turquie), etc., rend parfaitement illusoire l’émergence d’une politique publique européenne des religions.
Cet argument porté du point de vue des sciences politiques par François Foret (Université libre de Bruxelles) a été corroboré notamment par les travaux de la professeure de droit Lauréline Fontaine (Université Sorbonne nouvelle ‐ Paris III) qui, étudiant les arrêts de la Cour européenne des Droits de l’Homme, a démontré l’importance du contexte national dans les prises de décision des juges européens. Pour autant, les institutions européennes ont su créer des espaces permettant la rencontre du religieux (exemple : article 17 du Traité sur le fonctionnement de l’Union européenne). La réflexion interdisciplinaire dans ce contexte permet un dialogue fructueux entre acteurs et analystes de ces problématiques. Le religieux constitue un facteur de délimitation qui dans une Europe sans frontières et aux marches incertaines semble renforcer les particularismes identitaires, mais aussi politiques.