Avion russe abattu en Turquie : quel impact diplomatique ?

La Turquie a abattu le mardi 24 novembre un avion militaire russe près de sa frontière avec la Syrie. Comment interpréter cet évènement dans un contexte international déjà mouvementé ? Erdogan joue‐t‐il sur la carte nationaliste en réveillant la vieille inimitié entre la Russie et la Turquie ?

Le décryptage semble assez compliqué car on ne perçoit pas véritablement l’intérêt de la Turquie et la décision qu’elle a prise d’abattre un avion russe. La situation est déjà suffisamment compliquée dans la région. La Turquie elle‐même connaît des défis pour le moins préoccupants pour sa stabilité intérieure et, d’un strict point de vue rationnel, on a quelque difficulté à trouver les raisons profondes qui permettent de comprendre cet évènement. J’émets pour ma part deux hypothèses.

La première est que sur le dossier syrien, la Turquie se trouve depuis plus de quatre ans sur une ligne dont elle ne démord pas : il faut en finir avec le régime de Bachar al‐Assad et pour ce faire, tous les moyens sont bons. Or, nous constatons que cette ligne politique qui était partagée par d’autres Etats, dont la France, est en train de se modifier. C’est‐à‐dire que nombre d’Etats, dont la France, sont en train d’infléchir leur position en considérant que, certes le régime d’Assad est tout à fait condamnable, mais qu’en l’état des choses il faut faire avec et que la question de l’avenir de ce régime et du sort personnel du président syrien ne sera réglée qu’à l’issue d’un processus de négociation. C’est l’objet de la tournée diplomatique qui a été initiée par François Hollande depuis quelques jours et qui va se poursuivre jusqu’à la fin de la semaine. Or, nous constatons que, pour sa part, la Turquie ne bouge pas. Elle se retrouve ainsi assez isolée dans la gestion de ce dossier syrien. On pourrait imaginer qu’en abattant cet avion, elle cherche à réduire la marge de manœuvre de la Russie dont chacun comprend qu’elle a les meilleurs atouts en main pour faire valoir nombre de propositions sur le dossier syrien…