Notes / Observatoire géopolitique du religieux
26 novembre 2015
Le martyre comme processus social

Depuis les attentats du World Trade Center, nous sommes confrontés à une étonnante réapparition du martyre sur la scène internationale. La notion de martyre fut longtemps prépondérante dans l’imaginaire occidental, mais elle n’est plus désormais portée au pinacle. Le martyre est à présent associé à l’idée d’une recherche frénétique de la mort plutôt qu’à la patience et à l’endurance. Mais au‐delà de sa représentation mythique ou partisane, le martyre est un phénomène qui appelle une compréhension historique et sociologique. Il est rare qu’une société saine et pacifiée glorifie le martyre, alors que celles qui traversent des bouleversements importants lui portent une singulière attention. Ainsi, il peut être considéré comme le baromètre d’une société : plus il y a de martyrs, plus la crise est grande. Mais le martyre ne pourrait pas être efficace sans l’accord tacite du groupe qui l’encourage. Cette interaction entre individu et groupe est cruciale : c’est cet accord, au coeur d’une étrange réciprocité, qui donne sens à la mort des martyrs. En tant que phénomène de groupe, le martyre est au coeur des problématiques sociales. La figure du martyr cristallise le sentiment d’appartenance à une communauté ou à une faction radicale, car son sacrifice démontre un engagement ultime vis‐à‐vis d’une cause. Le martyr fait le choix du sacrifice. Cette notion de choix est très importante pour comprendre la dynamique du martyre contemporain.