ANALYSES

Jeux olympiques : le sport comme vecteur de puissance géopolitique

Presse
4 février 2022
Alors que les Jeux olympiques (JO) sont l’un des évènements sportifs les plus suivis au monde, quelle en est la symbolique et en quoi est-ce un enjeu de bien figurer au tableau des médailles dans cette compétition ?

Cet événement est particulièrement important à plusieurs égards. D’abord, et vous l’avez signalé, il s’agit de l’un des évènements (sportifs ou non) les plus suivis dans le monde. Les chiffres de Tokyo ne sont pas encore connus, mais le Comité international olympique (CIO) annonce une consultation en hausse de ses supports et un trafic plus important que lors des Jeux de Rio.

Ensuite, ces jeux sont également l’occasion de rassembler 206 comités nationaux (ou affiliés au CIO), rassemblement donc plus mondialisé que ne l’est l’Organisation des Nations Unies qui ne compte « que » 193 États membres. Lors du défilé ou lors d’une compétition, chaque comité national dispose d’une vitrine exceptionnelle, où ses athlètes, mais surtout son drapeau, son nom, voire son hymne en cas de victoire, auront une visibilité internationale et bénéficieront d’une attention médiatique redoublée. Prenons l’exemple du Kosovo qui, en glanant deux médailles d’or, a pu être particulièrement mis en avant.

Enfin, la question du tableau des médailles est également un élément incontournable de la compétition. Ainsi, la compétition entre les athlètes ne s’arrête pas à la sphère sportive, mais est également présente avec une dimension politique. George Orwell ne disait-il pas « à un certain niveau, le sport n’a plus rien à voir avec le fair-play […], ce n’est plus qu’une guerre sans coup de feu » ? À travers le tableau des médailles, les États se jaugent, se comparent et démontrent, autrement, leur puissance. Considérée par beaucoup comme une anecdote, la tension diplomatique entre les États-Unis et la Chine au lendemain des Jeux de 2008 me semble, au contraire, particulièrement révélatrice du pouvoir désormais pris par le sport sur la scène internationale. En effet, les deux superpuissances revendiquaient chacune la première place au classement des médailles, l’une au titre du nombre total de médailles, l’autre au titre du nombre de médailles d’or. Un scénario identique a failli se reproduire cette année, puisque la Chine, à quelques jours de la fin des Jeux, se trouvait à la première place, avant d’être doublée dans la dernière ligne droite par la délégation américaine, qui ne manqua pas de communiquer largement sur ce point. À bien des égards, les prochains Jeux olympiques et paralympiques qui auront lieu à Pékin en 2022 devront être suivis avec la plus grande attention.

Quel est le bilan sportif des JO de Tokyo ? Quelles sont les principales nations qui en ressortent gagnantes et quelles en sont les perdantes ?

Nous concentrerons ici nos remarques sur les Jeux olympiques, bien que les Jeux paralympiques méritent à eux seuls bien des explications. Quatre éléments peuvent ici retenir notre attention.

Tout d’abord et comme nous l’avons mentionné plus haut, ces jeux ont été marqués par une rivalité sino – états-unienne intéressante, où la première place au classement des médailles a été décrochée par les États-Unis lors des dernières heures de compétition. Si les États-Unis sont coutumiers de la première place, cela n’aurait été que la deuxième fois que la Chine y serait parvenue, ce qui, compte tenu de la proximité avec les prochains Jeux de 2022, aurait été particulièrement intéressant à analyser.

Le deuxième élément à retenir selon moi est la très bonne performance du Japon, troisième au classement des médailles, qui améliore considérablement son résultat des précédentes olympiades. En 2012, à Londres, le Japon se plaçait à une modeste onzième place. Cette performance s’inscrit dans une lignée intéressante puisque, depuis plusieurs décennies, le pays hôte brille systématiquement par des performances supérieures à la moyenne. Depuis 1980, les pays hôtes sont systématiquement classés, à l’exception notable de la Grèce en 2004 et du Brésil en 2016, parmi les six meilleures nations de l’olympiade. En plus de l’accueil de ce méga-évènement sportif, il s’agit ainsi de démontrer, par ce classement, la qualité de la formation des athlètes, non seulement vis-à-vis de sa population, mais aussi, et toujours dans un contexte de compétition, vis-à-vis des partenaires, des alliés ou des concurrents.

La Russie aura également joué un rôle important au cœur de cette olympiade en dépit de l’interdiction faite de défiler sous son drapeau, de jouer son hymne et d’être appelée par son nom. En réalité, cette sanction, émise par le Tribunal arbitral du sport, après six ans d’enquêtes et de rebondissements dans l’affaire du dopage russe, apparaît comme plus symbolique que réellement politique. En effet, les sportifs russes ont pu ainsi concourir sous le logo ROC (Russian Olympic Committee) ; toutefois, une autre bataille a eu lieu sur les réseaux sociaux, où le hashtag #WewillROCyou s’est rapidement répandu, en mettant en exergue les athlètes russes et leurs performances.

Enfin, nous pouvons également revenir sur la performance de la France, en deçà des attentes fixées et à trois ans des prochains Jeux, organisés sur son sol. Alors que l’objectif était fixé à quarante médailles, « seulement » trente-trois ont été glanées, avec notamment une exceptionnelle performance des judokas français. L’objectif de quatre-vingts médailles envisagé par le ministre de l’Éducation nationale, Jean Michel Blanquer, semble, aujourd’hui, difficile à atteindre…

Y a-t-il des pays pour lesquels les Jeux ont davantage d’importance, un enjeu politique, voire géopolitique ?

Il est essentiel de rappeler que les Jeux olympiques et paralympiques sont éminemment politiques, en dépit des différentes explications et arguments tendent à soutenir encore et toujours le mythe de l’apolitisme du sport. Ainsi, par leur participation aux Jeux, tous les comités nationaux olympiques vont chercher à exister, à performer, et des enjeux de politique intérieure comme de politique extérieure vont ici clairement entrer en ligne de compte.

Par ailleurs, cette question va aussi dépendre de l’importance attribuée au sport et aux Jeux dans certains pays. L’exemple typique est celui de l’Inde, qui demeure, encore aujourd’hui, le grand absent de la géopolitique du sport, en dépit de plusieurs tentatives menées au cours de la dernière décennie pour émerger dans ce domaine.

Il est aussi essentiel de rappeler que la participation (et les succès) à un méga-évènement sportif comme les Jeux olympiques et paralympiques est évidemment tournée vers la politique étrangère, mais peut être également orientée vers sa propre population, comme un ciment national, satisfaisant la fierté nationale et la fibre patriotique.

Toutefois, au-delà de ces considérations générales, nous pourrions imaginer une typologie de pays pour lequel ces Jeux revêtent une importance particulière. Certains pays vont utiliser la médiatisation considérable de ces Jeux pour « exister », avoir une plus grande visibilité sur la scène internationale, en tant que puissance sportive (le cas de la Jamaïque par exemple), ou tout simplement en tant qu’acteur international, non reconnu par le droit international et une partie de la communauté internationale, mais présent à ce méga-évènement sportif (citons par exemple ici le Kosovo, non reconnu par l’ONU).

D’autres pays vont au contraire voir en ces olympiades une manière d’affirmer leur puissance également dans le domaine sportif. Les exemples des États-Unis, de la Russie, de la Chine ou même de la France peuvent ici être donnés. Chacun, avec sa diplomatie sportive nationale, va tâcher de mettre en avant ses performances, son modèle de formation ou encore sa culture du sport d’élite.

Enfin, et comme nous l’avons déjà mentionné, les pays hôtes ont toujours une place spéciale dans le cadre de ces méga-évènements sportifs, puisqu’ils sont garants de la parfaite organisation logistique, technique, sportive. Il conviendra aussi de ne jamais sous-estimer l’importance des cérémonies d’ouverture, qui permettent au pays hôte de mettre en lumière son histoire et sa grandeur, mais aussi, dans certains cas, « d’imposer » son récit national à l’échelle planétaire, la cérémonie d’ouverture étant particulièrement prisée des téléspectateurs.

Alors que Washington et Pékin s’affrontent sur la scène internationale, dans les domaines économique ou technologique notamment, qu’en est-il de l’affrontement sportif entre ces deux nations depuis les JO de Pékin ? Quel est l’enjeu ?

Si l’opposition sino – états-unienne est largement documentée dans les domaines politique, économique, technologique et universitaire, elle demeure beaucoup moins explorée dans celui du sport. Pourtant, au regard du demi-siècle passé, force est de constater qu’il existe là un véritable champ d’étude et de réflexion.

C’est effectivement et indéniablement une opposition continue depuis 2008. Nous aurions tendance à considérer cela comme une anecdote, mais il convient de se souvenir de la brouille diplomatique intervenue entre les deux pays au lendemain de la fin des Jeux olympiques de Pékin en 2008. À l’époque, il y avait justement eu une compétition directe entre ces deux États, chacun revendiquant la première place au classement des médailles : l’un au nombre total de médailles et l’autre au nombre de médailles d’or. Cet été, nous avons pu à nouveau constater une forte opposition entre Pékin et Washington d’un point de vue sportif et notamment au regard des médailles gagnées. Quelques heures avant la fin des jeux de Tokyo, la Chine était devant au classement des médailles avant de se faire doubler par les États-Unis. Mais, plus largement, en ce qui concerne la diplomatie sportive, nous avons pu observer une Chine de plus en plus influente au sein du sport international, en sachant se positionner au centre de fédérations, mais aussi en se faisant remarquer par les bonnes performances de plusieurs de ses athlètes. Par ailleurs, la Chine a su se positionner sur un certain nombre de nouveaux sports, nouvellement présents au programme olympique ; ce qui constitue un élément important de sa stratégie.

L’enjeu derrière cet affrontement est donc une façon d’exprimer là encore sa puissance d’une autre manière pour arriver à faire entendre ses idées et à faire prévaloir son modèle sur l’autre.

Au cours des JO de Tokyo, l’affrontement sino-américain a notamment été marqué par deux affaires : les badges à l’effigie de Mao, et la réaction de Raven Sanders croisant ses poignets sur le podium. Quelle est la portée de ces évènements ?

Ces démonstrations, ainsi que d’autres — comme des genoux à terre — ont été réalisées pour des motifs distincts et des objectifs politiques différents, que l’on ne pourra ici rassembler sous un même parapluie. En revanche, ces gestes s’inscrivent dans un double contexte de mobilisation croissante des sportifs et sportives pour faire entendre leur voix. Cela constitue un problème croissant pour le CIO qui peine à faire respecter la règle 50 de la charte olympique qui dispose qu’« aucune sorte de démonstration ou de propagande politique, religieuse ou raciale n’est autorisée dans un lieu, site ou autre emplacement olympique ». Bien que des ajustements aient été proposés, la situation reste, pour le CIO, relativement complexe à gérer. Au regard des interpellations à l’égard du pouvoir chinois sur la situation des droits de l’homme, corrélées à une politisation croissante des sportifs et sportives au cours des dernières années, les prochains Jeux olympiques et paralympiques à Pékin vont être pour l’instance suisse une édition particulièrement périlleuse, où l’essentiel ne se passera peutêtre pas sur les pistes.

Qu’en est-il de l’influence grandissante de Pékin au sein des fédérations sportives internationales ? Quel est l’enjeu à ce niveau ?

Comme nous l’avions souligné avec Estelle Brun dans un article au sein de la Revue internationale et stratégique consacrée à l’opposition sino – états-unienne (1), la diplomatie sportive peut prendre différents aspects, au-delà de l’accueil des grands évènements sportifs internationaux. Le positionnement de personnes clés au sein d’instances dirigeantes, de parties prenantes du monde du sport, en est un. À l’instar de la montée en puissance de la Chine en termes de performances sportives, il a été intéressant de remarquer qu’une attention importante a également été portée à la représentation d’hommes et de femmes chinoises au sein de fédérations sportives, à l’instar de la stratégie mise en œuvre au sein d’autres organisations internationales comme l’Organisation de l’aviation civile internationale (OACI), l’Organisation des Nations Unies pour l’alimentation et l’agriculture (FAO), l’Organisation des Nations Unies pour le développement industriel (ONUDI) et l’Union internationale des télécommunications (UIT) (2). Au cours des dernières années, la Chine avait ainsi cinq représentants comme vice-présidents de fédérations internationales ( escalade, gymnastique, skateboard, tir et tennis de table).

Un autre élément qu’il nous paraît également essentiel de rappeler concernant une autre expression de l’importance chinoise dans le monde du sport est lié au monde économique. En effet, nous pouvons observer la multiplication de sponsors chinois au cours des dernières années, que cela soit pour les Jeux olympiques et paralympiques, les Coupes du monde de football ou lors d’autres grandes compétitions continentales. Ainsi, les panneaux au bord des terrains sont désormais aux couleurs de Wanda, Huawei, Hisense, Mengniu, Vivo, Alibaba, etc.

L’exclusion de la Russie des Jeux olympiques — pour cause de dopage — a-t-elle réellement eu une conséquence pour Moscou et l’image du pays ? Quelle est officiellement la position de Moscou par rapport à cette exclusion ?

Depuis décembre 2014 et le témoignage de deux lanceurs d’alerte sur l’existence d’un système de dopage à grande échelle en Russie, le pays se trouve sans cesse au cœur d’enquêtes et de jugements. Le Tribunal arbitral du sport a rendu sa sentence en décembre 2020, réduisant la précédente sanction infligée à la Russie par l’Agence mondiale antidopage, en lui interdisant finalement pour deux ans de participer à toute compétition sportive internationale sous ses couleurs et d’accueillir sur son sol un méga-évènement sportif international. Alors que la Russie avait fait le pari de miser sur une diplomatie sportive active depuis le début des années 2000, ce scandale, sa découverte et les sanctions qui ont suivi ont clairement ralenti la dynamique voulue par Vladimir Poutine.

Cependant, si la sanction du tribunal de Lausanne peut sembler dure, elle apparaît en réalité surtout symbolique puisque, en dépit des sanctions prononcées, les sportifs et sportives russes ont pu participer aux olympiades, ainsi qu’à différents types de compétitions comme l’Euro masculin de football, ne s’agissant pas de compétitions sportives internationales, mais bien continentales. De la même façon, et à l’horizon 2022, Vladimir Poutine a accepté « avec plaisir » l’invitation de Xi Jinping pour les Jeux de Pékin, contournant ainsi l’interdiction lui étant faite de se déplacer à l’occasion d’une compétition sportive internationale.

Par ailleurs, et comme mentionné, les différentes campagnes de communication sur les réseaux sociaux autour du hashtag #wewillRocyou ou l’utilisation de l’ours comme symbole de l’équipe lors des Jeux d’hiver de 2018 ont eu tendance à mobiliser la communauté russe autour de son équipe et à apparaître plus soudée que jamais. Les très bonnes performances de l’équipe du comité olympique russe (selon le titre officiel) ont également participé à revendiquer ce retour parmi les premiers rangs de la scène internationale sportive. Une fois encore, les Jeux de Pékin seront intéressants à regarder sous ce prisme-là, notamment en raison des traditionnels bons résultats russes lors de ces compétitions.

Les JO de Tokyo ont aussi été marqués par l’affaire de la sprinteuse biélorusse. Quelle portée a-t-elle eue ?

Krystina Tsimanouskaya, sprinteuse biélorusse, spécialiste du 100 mètres et du 200 mètres, a été, contre son gré, une figure forte de ces Jeux, en dénonçant sur les réseaux sociaux la politique de sa fédération ainsi que celle de son comité olympique. Rappelée à Minsk, elle a interpellé, toujours via les réseaux sociaux, le CIO ainsi que d’autres athlètes, demandant à être protégée.

Cet épisode a permis une nouvelle fois de mettre en lumière la situation biélorusse et de rappeler les importantes manifestations contre le président Alexandre Loukachenko. Rappelons ici que, dans le domaine sportif, le pays avait déjà subi un camouflet en janvier 2021, en se voyant retirer la coorganisation du championnat du monde de hockey sur glace, en raison des questions de sécurité liées aux manifestations importantes encore organisées dans le pays ainsi que de la situation sanitaire. En juillet 2021, c’est une fois de plus à travers le prisme du sport que l’attention internationale s’est, de nouveau, focalisée sur la Biélorussie.

Enfin, comment s’annoncent les JO d’hiver de Pékin en 2022 alors que certains appellent à un boycott ?

Les Jeux olympiques et paralympiques de Pékin vont être ô combien intéressants à suivre, et ce, à plusieurs égards.

Tout d’abord, rappelons que Pékin sera la première ville à accueillir dans son histoire les Jeux olympiques et paralympiques d’été (2008) et d’hiver (2022), de surcroît en l’espace de seulement quatorze ans. Ce caractère exceptionnel est d’ailleurs régulièrement rappelé par le comité d’organisation, qui entend faire de ces Jeux un moment important de sa diplomatie sportive. Rappelons également que l’un des prochains objectifs de Pékin est de candidater à l’organisation d’une prochaine Coupe du monde masculine de football, en 2030 ou, plus probablement, en 2034.

Ensuite, ces Jeux arrivent dans un contexte (théoriquement) post-Covid, seulement quelques mois après ceux de Tokyo, décalés d’un an et très fortement marqués par la pandémie. Rappelons d’ailleurs à ce propos que ceux-ci devaient être des Jeux post-Covid, ou « Jeux de la renaissance », censés incarner le retour de la vie normale. Il est d’ailleurs intéressant de noter que Tokyo tenait à ce que ses Jeux soient ceux du renouveau, ne souhaitant pas laisser à Pékin l’occasion de revendiquer ce titre. Toutefois, les Jeux de Pékin seront encore fortement marqués par la pandémie puisque le comité d’organisation a annoncé qu’ils allaient se dérouler sans spectateurs étrangers. Cette configuration ne va pas manquer de mettre en avant la ferveur chinoise à la fois pour cet évènement et pour les sportifs et sportives chinois qui vont concourir pendant ces Jeux olympiques et paralympiques.

Par ailleurs, la question d’un potentiel boycott va continuer à émerger dans le débat jusqu’à la tenue de ce méga-évènement sportif. Il convient de rappeler que différents appels au boycott sont apparus depuis plusieurs années déjà, dès l’attribution de la compétition, en 2015. Il est intéressant de noter trois prises de position particulièrement importantes au cours des derniers mois : celle de Nancy Pelosi, présidente de la Chambre américaine des représentants, qui a appelé à un boycott diplomatique ; celle de Mitt Romney, sénateur américain et ancien candidat à la présidentielle, appelant à un boycott économique ; et, de manière plus surprenante, la résolution (non contraignante) du Parlement européen demandant en juillet 2021 « à la Commission, au Conseil et aux États membres de refuser les invitations de représentants gouvernementaux et de diplomates à assister aux Jeux olympiques d’hiver de Pékin 2022, à moins que le gouvernement chinois ne démontre une amélioration tangible de la situation des droits de l’homme à Hong Kong, dans la région ouïghoure du Xinjiang, au Tibet, en Mongolie intérieure et ailleurs en Chine ». Néanmoins, au-delà de ces prises de position, il est également intéressant de noter l’absence quasi totale de débat politique sur ce sujet en France.

Si les appels au boycott vont, à n’en pas douter, se multiplier au cours des prochaines semaines et mois, l’organisation d’un boycott sportif coordonné et généralisé paraît toutefois fortement improbable. En effet, s’ils avaient été suivis dans leurs réalisations lors des olympiades de 1976 (contre le régime d’apartheid en Afrique du Sud), de 1980 (contre notamment l’invasion soviétique en Afghanistan), et 1984 (pour des raisons de sécurité), ces boycotts s’inscrivaient dans une période spécifique de guerre froide, dans une logique de blocs qui prévalait sur tout le reste. Or, aujourd’hui, il apparaît difficile d’analyser le monde de manière si tranchée et, de ce fait, ce mécanisme semblerait ne plus pouvoir être activé et donc fonctionner. Soulevons toutefois un paradoxe puisqu’il semblerait que les intentions de boycott puissent être plus « efficaces » que les boycotts eux-mêmes. En effet, en polarisant le débat sur ce sujet, en prenant à témoin l’opinion publique nationale comme internationale sur les revendications et sur les situations décriées, les leviers de pression semblent de plus en plus importants.

 

Propos recueillis par Thomas Delage pour Diplomatie Magazine le 12 octobre 2021.
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