10.12.2024
Pétrole : « Les Saoudiens veulent punir la Russie »
Presse
11 mars 2020
Il y a une seule certitude dans cette affaire, c’est l’annonce par Saudi Aramco, la compagnie nationale saoudienne, d’une baisse des prix du brut à l’export à compter du 1er avril. En ce qui concerne la hausse de sa production, c’est moins clair. L’annonce n’a pas été faite officiellement, mais les Saoudiens ne l’ont pas démentie. Ce changement de stratégie est en tout cas majeur. Vendredi, à Vienne, la Russie a dit non à une nouvelle réduction de la production Opep et non-Opep, alors qu’elle ne concernait, pour les dix pays non-Opep, que 500 000 barils par jour. Les Saoudiens l’ont très mal pris. Le royaume a donc décidé d’un revirement complet qui a pour objectif de défendre ses parts de marché.
Les Saoudiens décident de jouer perso, autrement dit ?
Oui, c’est ça. Ils baissent les prix et, sans doute, ils augmenteront la production, ce qu’ils ont les moyens de faire, pour entamer une guerre contre les Russes. C’est assez clair. Saudi Aramco n’a pas besoin d’un mégaphone pour l’annoncer : la cible, c’est la Russie. Les Saoudiens considèrent qu’elle a quitté le navire, il faut donc la punir.
Sauf que, avec des prix de plus en plus bas, beaucoup d’autres pays producteurs et exportateurs vont souffrir.
Bien sûr. Mais ce qui se passe est comparable à l’histoire russe des deux chasseurs : ils tirent sur un ours, le ratent, donc, l’ours part à leurs trousses, et l’un des deux chasseurs dit : « L’ours va nous rattraper, l’important, c’est que je coure plus vite que toi. » En clair, certains pays vont souffrir plus que d’autres !
L’Arabie saoudite vise-t-elle aussi les États-Unis, qui sont devenus un pays exportateur grâce au pétrole et au gaz de schiste ?
La Russie est la cible principale, les États-Unis la cible secondaire. Leur industrie pétrolière, en particulier les petits producteurs, risque de souffrir. Il faut prévoir des faillites et des restructurations au sein du secteur pétrolier américain.
La crise risque-t-elle de durer ?
Tout dépend de la réaction russe. Si Moscou se dit : « On a fait une boulette, il faut renouer le dialogue », les discussions avec l’Opep peuvent reprendre, comme depuis la fin 2016. Si Moscou se dit : « On va voir ce qu’on va voir », la situation risque de perdurer. Le problème, c’est que ces questions se règlent au niveau des chefs d’État, où les questions d’ego sont primordiales !