ANALYSES

« Il faut se rapprocher de la Russie »

Presse
18 novembre 2015
Peut-on continuer à combattre à la fois Daesh et Bachar al-Assad, ou faut-il hiérarchiser nos ennemis et nos cibles ?
Il y a apparemment une hiérarchie. On souhaite la disparition des deux et on pense qu’aucun des deux ne doit rester. Mais, pour l’instant, on ne combat pas Bachar al-Assad militairement, on le combat politiquement. Il n’y a pas de bombardement français sur les sites ou les troupes de Bachar al-Assad, alors qu’il y en a sur les troupes de Daesh. On peut dire que, dans les deux cas, le slogan reste le même : ni Bachar al-Assad, ni Daesh. Mais, d’un point de vue opérationnel, dans la mesure où la France a été frappée par Daesh, elle attaque Daesh militairement.

Faut-il s’allier avec Vladimir Poutine ?
Oui, parce que lui aussi a été atteint avec l’attentat de l’avion russe au-dessus du Sinaï (Égypte). Et, de toute façon, on sait très bien qu’il n’y aura pas de solution en Syrie sans la Russie. Il ne s’agit pas d’une alliance en tant que telle, mais d’une coalition de circonstance. Il est nécessaire de se rapprocher de la Russie parce que, sur ce dossier-là, on ne peut espérer trouver une solution à l’encontre de la Russie. Même si les points de vue ne sont pas toujours les mêmes, même si on peut avoir des divergences, comme sur le sort à réserver à Bachar al-Assad.

Peut-on lutter efficacement contre Daesh en s’appuyant sur des alliés aussi peu sûrs que le Qatar et l’Arabie saoudite ?
On peut penser qu’ils sont fiables, parce que, quelle qu’ait été leur attitude par le passé, ils sont aujourd’hui directement menacés par Daesh. Ils n’ont donc pas tellement le choix. Je dirais même que, s’il doit y avoir une intervention terrestre, elle doit être le fait des États sunnites de la région et certainement pas le fait d’États occidentaux. Si on veut être efficace sur le long terme, il faut s’appuyer sur les pays du Golfe, sur la Turquie, et avoir des consultations serrées avec l’Iran.

Comment analysez-vous le rôle joué par la Turquie d’Erdogan ?
On sait très bien que la Turquie n’a pas tout à fait contrôlé sa frontière puisque son objectif numéro un était le départ de Bachar al-Assad et que la Turquie, elle aussi, a été atteinte dans sa chair, victime d’attentats meurtriers. La Turquie est ainsi désormais de notre côté, même s’il y a une dimension kurde particulière que l’on ne peut pas ignorer, mais dont il faut parler avec les Turcs.
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