ANALYSES

En parlant de « Golfe arabique », Trump « attise les tensions dans la région »

Presse
14 octobre 2017
Interview de Karim Pakzad - L'Express
Donald Trump a parlé du « Golfe arabique » au lieu du « Golfe persique », est-ce une erreur ou une provocation?

C’est une provocation, comme la plupart des déclarations de Donald Trump. Venant de lui, il n’y a aucun doute et ça ne surprend personne. Il choisit volontairement de dire « Golfe arabique », un terme utilisé uniquement par l’Arabie saoudite. Historiquement tout le monde parle du Golfe persique. Mais Donald Trump n’a aucune considération pour l’ordre établi. Ce n’est pas un intellectuel. Et il n’a aucun passé ni dans le monde politique, ni dans le monde diplomatique. Il se fiche complètement que ses déclarations puissent gêner.

L’utilisation de cette expression va-t-elle avoir des conséquences?

Tout le monde est désemparé face à ses provocations. On se demande vraiment s’il est conscient de ce qu’il dit et de ce qu’il fait. Est-ce que ses propos sont basés sur des analyses ou bien s’exprime-t-il à l’emporte pièce en suivant son instinct? Est-il totalement incontrôlable? Entre chercheurs nous nous posons réellement ces questions.
L’utilisation du terme de « Golfe arabique » n’a pas de sens. Trump va uniquement accroître les tensions dans la région du Moyen-Orient. L’Arabie saoudite va dire « les États-Unis nous suivent et disent désormais Golfe arabique », ce qui va attiser la colère des Iraniens.

Et pourquoi ces propos irritent-ils tant les Iraniens?

Dans cette partie du monde, les rivalités sont très fortes. L’Iran n’est pas un pays riche comme l’est l’Arabie saoudite. Mais l’Iran est un très grand pays, avec une histoire millénaire. C’est un peuple fier, qui occupe une grande place dans l’histoire de l’Humanité.

Quelles peuvent-être les conséquences de ces provocations?

Au delà de la provocation de Trump avec l’utilisation du terme de « Golfe arabique », son discours est lourd de conséquences. En déclarant que l’Iran ne respecte pas l’accord sur le nucléaire et en refusant de le certifier, il tente de se mettre à la place de l’Agence internationale de l’énergie atomique (AIEA). C’est pourtant la seule instance habilitée à juger si l’Iran respecte ou non ses obligations.
En accusant l’Iran comme il l’a fait, Trump va obtenir exactement l’inverse de ce qu’il souhaite. A part Israël et l’Arabie saoudite, tout le monde tient à l’Accord de 2015 et personne ne suit le président américain. Même le Royaume-Uni, pourtant très proche de Washington, s’est désolidarisé. Berlin et Paris aussi. Emmanuel Macron a d’ailleurs répondu avec force en affirmant qu’il envisage de se rendre en Iran.

Trump ferait donc le jeu de l’Iran?

Tout à fait. L’Iran se trouve dans une position formidable puisque le monde entier appelle les États-Unis à respecter leur parole et l’accord sur le nucléaire. Donc s’il pensait affaiblir le régime iranien, Trump est en réalité en train de le renforcer. De plus, en attisant les tensions internationales, il exacerbe le sentiment patriotique des Iraniens. Au lieu de diviser le pays, il permet au contraire au régime d’être largement soutenu par la population.
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