ANALYSES

Accord sur le nucléaire iranien : la levée des sanctions est-elle en bonne voie ?

Interview
20 octobre 2015
Le point de vue de Thierry Coville
Les députés iraniens viennent d’approuver l’accord nucléaire avec les grandes puissances. Si les débats autour de ce vote se sont avérés très houleux, peut-on néanmoins dire qu’il fait consensus auprès de la population iranienne ? Quid des engagements iraniens désormais ?
Si une petite minorité pense que le pays a fait trop de concessions, la très grande majorité de la population est favorable à l’accord. L’Iran souhaite une normalisation de ses relations avec le reste du monde. La classe moyenne, première victime des sanctions, veut entretenir des contacts avec l’Occident et les États-Unis.
Concernant les engagements iraniens, le pays a signé le protocole additionnel du Traité de non-prolifération des armes nucléaires (TNP), qui autorise des visites rapides de l’Agence internationale de l’énergie nucléaire (AIEA) afin de s’assurer de l’absence d’activités et de matériaux nucléaires non déclarés. Un certain nombre de questions qui étaient en suspens vis-à-vis l’AIEA viennent d’être réglées. Maintenant, l’Iran doit notamment réduire le nombre de ses centrifugeuses, faire des aménagements au sein de sa centrale d’enrichissement de Fordo pour arrêter d’y enrichir de l’uranium, modifier le réacteur de la centrale d’Arak pour ne pas pouvoir produire du plutonium à des fins militaires. Une fois que ces engagements seront remplis, l’AIEA le confirmera.

La décision de l’Union européenne et des États-Unis de préparer officiellement la suspension des sanctions intervient trois mois après la signature de l’accord. En quoi est-ce une étape cruciale ?
Cet accord a passé l’étape du Congrès américain qui avait légalement les moyens à travers une majorité suffisante de refuser la levée des sanctions américaines bilatérales contre l’Iran. Cela aurait véritablement mis à mal cet accord. Cette étape importante s’est d’ailleurs mieux déroulée que prévu car le président Obama n’a pas eu besoin de déposer son veto. Le parlement iranien ayant validé cet accord, plus rien ne s’oppose aujourd’hui à son application, si ce n’est que chacun doit remplir ses engagements. Ainsi, tout se déroule actuellement comme prévu et tout le monde attend que l’Iran mette en œuvre ce qui était prévu dans l’accord et que les sanctions puissent être levées d’ici début 2016.

L’initiative de Barack Obama est-elle corrélée au facteur « politique intérieure » ? La victoire d’un candidat républicain aux élections présidentielles de 2016 pourrait-elle s’accompagner d’un possible retour en arrière concernant le dossier iranien ?
Cette menace a en effet été explicite puisqu’un certain nombre de sénateurs américains ont envoyé une lettre aux autorités iraniennes, leur disant que cet accord ne valait qu’avec le président Obama et qu’un nouveau président républicain pourrait le remettre en cause. Cela étant, il faut rester prudent face à cette question. L’accord doit être effectif et s’il commence à être appliqué, si les sanctions sont levées et que l’Iran tient ses engagements, il sera très certainement difficile de revenir sur cet accord. Il est probable qu’un président républicain, avec l’aide du Congrès, tente de mettre la pression sur l’Iran en votant de nouvelles sanctions mais revenir sur cet accord apparaît compliqué.
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