Afghanistan : le pari d’Obama
Tribune
3 décembre 2009
Or Karzaï qui vient d’être réélu pour un second mandat n’est pas réellement pris au sérieux par Obama qui en privé dénonce sa corruption et son inefficacité. L’objectif militaire est de détruire al-Qaida. (Ce qu’aurait dû faire Georges Bush s’il avait mené le combat jusqu’au bout en 2002). Il n’est plus de construire des institutions et une démocratie vivante en Afghanistan. Il s’agit simplement d’aider le gouvernement afghan à améliorer sa gouvernance et à combattre la corruption. Une grande partie de la réponse se tient au Pakistan. Est-ce que les autorités d’Islamabad ont joué le jeu et est-ce qu’ils vont se mettre à combattre réellement les Talibans avec lesquels ils ont un partenariat de facto afin de contrer l’influence indienne ? Les Européens sont gênés. Si l’OTAN annonce vouloir également renforcer sa présence, les pays contributeurs ne se bousculent pas. Ils sont eux-mêmes soumis à des pressions politiques intérieures. Les opinions ne voient pas de résultats tangibles à leur engagement militaire dans la région. Elles commencent donc à se lasser et à s’interroger. Et par ailleurs, les ressources deviennent rares. Le président Sarkozy en France a appuyé la démarche de Barack Obama. Mais il est peu probable qu’il envoie des troupes supplémentaires difficiles à trouver matériellement. Un renforcement de la présence militaire française pourrait en outre soulever un débat pour le moment limité dans l’opinion publique. Il en va de même chez tous les partenaires de l’OTAN qui participent à la guerre en Afghanistan. Est-ce que les forces afghanes pourront prendre à terme le relais des forces internationales ? Tel est le pari de Barack Obama qui engage une partie de sa crédibilité sur cette affaire.
C’est en tous les cas 30 milliards de dollars par an supplémentaire qu’il va dépenser pour l’Afghanistan augmentant ainsi le poids des dépenses militaires américaines à un moment où les citoyens américains estiment de plus en plus nécessaire de porter l’effort sur les questions sociales et intérieures. Et se pose également une question fondamentale. Si chacun s’accorde à penser que George Bush a manqué une opportunité de mettre fin à al-Qaida en 2002, est-il toujours temps de le faire par un renforcement militaire en Afghanistan ? Les quelques centaines de combattants qui survivent sont plutôt dispersés au Pakistan qu’en Afghanistan. Le renforcement de la présence militaire occidentale, perçue comme une force d’occupation peut tout autant fédérer les Afghans autour des Talibans, qui de fait se font une réputation de résistance, que permettre une victoire des forces loyalistes afghanes. Les soldats américains sont-ils prêts à se mélanger à la population pour gagner la bataille du cœur et des esprits ou bien vont-ils continuer à vivre isolés et opérer à l’extérieur de façon perçue comme agressive par la population ? Des troupes occidentales dans un pays musulman dans les circonstances stratégiques actuelles ne risquent-elles pas d’être plus vécues comme des troupes d’occupation – à combattre – que des troupes de libération à soutenir ?