ANALYSES

Le vote latino et l’élection de 2016

Presse
13 novembre 2013
Par Philippe Thureau-Dangin, chercheur associé à l’IRIS

Dans trois ans aura lieu la prochaine présidentielle aux Etats-Unis, et tout le monde outre Atlantique prend déjà ses marques. La campagne des primaires pourrait bien être « passionnante », comme le dit Newt Gingrich. Car l’ère Obama sera close et il faudra des deux côtés proposer une nouvelle politique. Même si le vice-président Joe Biden se lance dans la course, il ne sera pas vu comme un « héritier » de l’actuel président. II trouvera à ses côtés Hillary Clinton, qui ne fait pas mystère de son ambition, et quelques autres moins connus comme Evan Bayh, l’ancien sénateur de l’Indiana.


Côté républicain, le parti semble en lambeaux mais plusieurs candidats sont tout à fait crédibles, à commencer par Jeb Bush, ancien gouverneur de Floride, frère et fils de qui on sait. Mais il y a aussi Marco Rubio, le sénateur de Floride, Paul Ryan, l’ancien colistier de Mitt Romney, et surtout le modéré Chris Christie.


La réélection de ce dernier, le 5 novembre, avec 60% des votants (!), au poste de gouverneur de l’Etat du New Jersey le place dans une situation idéale. L’homme a maigri un peu (un effort qui plaît aux femmes, dit-on), a gardé son franc parler (qui plaît aux hommes blancs), et il fait très attention à ne choquer personne. II est opposé à l’avortement mais n’en parle pas. Et sur le mariage gay, il a très bien compris que l’opinion n’y est plus majoritairement opposée, même dans l’électoral républicain.


Mais la clé de 2016 pourrait être le vote des latinos. Leur poids démographique et politique est de plus en plus évident. Avec 23,5 millions de personnes en âge de voter, ils pourront faire la décision dans plusieurs Etats ou démocrates et républicains sont au coude à coude (les fameux« swing states »), notamment la Floride et le Colorado. Ces latinos, qui ont voté massivement pour Obama en 2012, porteraient sans doute leurs voix sur Hillary Clinton. Mais face à un autre candidat démocrate, Biden par exemple, ils pourraient être nombreux à voter républicain.


 Chris Christie, dans son Etat, a réussi à capter 51% du vote latino, une performance remarquée par les analystes. Mais sera-t-il seulement le candidat du Great Old Party ?


On sait qu’une élection aux Etats-Unis se gagne en deux temps, d’abord dans son propre camp par des positions fermes, puis en mettant de l’eau dans son vin pour gagner l’électorat indépendant. Chris Christie, lui, a décidé de se placer tout de suite au centre de l’échiquier. II aura donc contre lui, dans un premier temps, les caciques de son parti, les grosses fortunes du Texas et le Tea Parly, qui garde de beaux restes malgré ses récentes déculottées électorales. Mais son pari pourrait réussir si, face à lui, Hillary Clinton s’impose vite dans la course démocrate. Car alors, Christie n’aura aucun mal à mobiliser, contre elle, toute la droite et l’extrême droite du pays.

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