ANALYSES

« Pyongyang sait qu’il a tout à perdre à aller trop loin »

Presse
9 août 2017
Que cherche la Corée du Nord et jusqu’où peut-elle aller ?

La Corée du Nord a son propre agenda, celui de continuer à développer son programme ballistique et nucléaire. C’est sa priorité absolue. Le régime a un autre impératif, celui d’assurer coûte que coûte sa survie. Ces deux données font que Pyongyang n’a pas vocation à faire des choses trop graves de conséquences car les dirigeants savent qu’ils ont tout à perdre à aller trop loin. Cela ne les empêche pas de mener quelques actions ponctuelles, comme couler un bâtiment sud-coréen ou bombarder une île comme ils l’ont déjà fait. Au-delà, les cartes seraient rebattues, et en cas de conflit, la Corée du Nord sait qu’elle paierait le prix fort. Ce n’est pas son intérêt. Ce qu’elle veut, c’est être reconnue comme un Etat nucléaire.

Quelle est sa capacité militaire réelle ?

Personne ne peut farfouiller dans les régiments. Il est donc difficile de vérifier les capacités techniques des matériels. En revanche, on sait qu’un tiers de la population est mobilisable, réservistes inclus, et que l’armée nord coréenne est la quatrième au monde pour le nombre de soldats. Voilà 64 ans que les dirigeants de Pyongyang annoncent une invasion imminente de leur territoire par la Corée du Sud. Il ne s’est toujours rien produit, mais la population est prête. L’armée est bien plus dans une posture de résistance qu’en position d’attaque, et a de quoi se défendre : 8.000 pièces d’artillerie sont braquées sur Séoul. Mais on ne sait pas si toutes sont en état de fonctionner. Ce qui est clair, c’est que le programme balistique et nucléaire constitue de loin le joyau de cette force militaire .

Comment Pyongyang supporte ces dépenses ?

Il faut déjà une économie capable d’alimenter, en partie au moins, les besoins financiers du programme nucléaire et balistique. Kim Jong-un, depuis son arrivée au pouvoir, se dit partisan d’une libéralisation partielle de l’économie. Cela fonctionne plus ou moins et la croissance décolle à présent.
Elle aurait atteint +3,9 % l’an dernier, selon la Banque de Corée à Séoul. Même si on ne connaît pas exactement le coût du programme militaire, on sait en revanche que Pyongyang bénéficie d’autres sources de financement. Il y a ses exportations bien sûr mais aussi les transferts de technologie auxquels il consent. Notamment avec des nations comme le Pakistan, l’Iran ou la Syrie. Et puis il y a aussi tous les trafics dans lesquels trempe le pays, notamment celui de fausses monnaies. C’est en Corée du Nord que l’on trouve les meilleurs faux billets de 100 dollars au monde !

Comment se protègent les voisins et comment peuvent-ils réagir ?

Aujourd’hui, on découvre plus la situation qu’on ne s’en protège. Tout le monde a pendant des années minimisé la capacité technologique de la Corée du Nord. Les ingénieurs de Pyongyang sont allés beaucoup plus vite . Ils rencontrent encore des difficultés pour absorber les frottements et les températures très élevées générés par la rentrée du missile dans l’atmosphère. Mais ils progressent. Lorsqu’on voit à quel point ils tiennent à ce programme, il est impensable de demander au régime de Kim Jong-un de s’engager dans une dénucléarisation.

Quel rôle joue la Chine ?

Pékin veut remettre en route le processus collégial des pourparlers à six en y intégrant bien entendu la Corée du Nord. Mais parallèlement, elle n’hésite pas à remettre son voisin nord-coréen à sa place lorsque ce dernier dérape comme il y a quelques jours. Wang Yi, le ministre chinois des Affaires étrangères a demandé à Pyongyang de cesser immédiatement ses tirs et de se montrer sous un meilleur jour. La Chine appelle en général tout le monde à la retenue car elle redoute par dessus tout de voir disparaître cet Etat qui est à ses portes.
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