ANALYSES

« On parle des conflits qui nous concernent directement »

Presse
3 janvier 2017
Interview de Pascal Boniface - L'Alsace
Pourquoi autant de conflits sont oubliés ?

On parle surtout des conflits qui nous concernent directement. Celui dont on parle le plus c’est la Syrie parce qu’il a fait entre 300000 et 400000 morts en cinq ans, mais aussi parce qu’il a des répercussions directes chez nous avec le terrorisme et la question des réfugiés. I l y a des conflits en Afrique qui ont fait de nombreux morts dont on parle moins, comme en Republique démocratique du Congo. Il y a aussi un conflit terrible au Sud-Soudan mais il n’a pas de répercussions terroristes chez nous.

Y a-t-il plus ou de moins de guerres aujourd’hui ?

Statistiquement, il y a moins de conflits et ils font globalement moins de morts qu’il y a 20 ou 30 ans. Les chiffres démentent les perceptions. On a le sentiment qu’il y en a plus mais c’est dû à une meilleure information sur les conflits D’autre part, le public y est beaucoup plus sensible. Il y a moins d’indifférence qu’auparavant.

Ces guerres sans fin, est-ce un échec de l’Onu ?

C’est plutôt un échec des grandes puissances après la fin de la guerre froide. Elles n’ont pas su mettre en place ce qu’on qualifie de nouvel ordre mondial. Lors de la guerre du Golfe en1990, toutes les grandes puissances étaient ensemble. L’Union soviétique de Gorbatchev avait accepté de punir Saddam Hussein qui violait le droit international et la Chine s’était abstenue. Au conflit idéologique Est-Ouest s’est substitué non pas une entente mais des rivalités nationales qui mènent à la poursuite des conflits, de la guerre d’Irak des Américains en 2003 au soutien de la Russie à Bachar al-Assad aujourd’hui.

Le nouveau secrétaire général de l’Onu peut-il changer les choses ?

Antonio Guterres peut infléchir les choses car il est charismatique et qu’il sera moins prisonnier des membres permanents du conseil de sécurité que son prédécesseur, qui était surtout très dépendant des Etats-Unis. Mais il ne faut pas se leurrer, le secrétaire général n’est pas le président des Nations unies. Ce sont toujours les membres permanents qui dirigent la manœuvre.

Recueillis par Luc Chaillot
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