ANALYSES

«Une politique étrangère des Etats-Unis plus imprévisible»

Presse
10 novembre 2016
Interview de - La Dépêche du midi
Donald Trump a fait beaucoup de déclarations sur la politique étrangère des Etats-Unis. Pas facile de s’y retrouver. Y a-t-il une ligne directrice ?

La politique étrangère de Donald Trump devrait être très transactionnelle, pas forcément cohérente mais au coup par coup, basée sur les qualités de négociateur dont il aime se féliciter. Ce qu’il y a de certain, c’est que nous aurons à faire avec une politique des Etats-Unis moins cohérente, en tout cas plus imprévisible, notamment sur les trois grands chantiers internationaux laissés par le président sortant Barack Obama derrière lui : l’Europe de l’Est, c’est-à-dire l’Ukraine et la Russie, le Moyen-Orient et l’Asie.

Quels changements apparaissent cependant envisageables dans les relations avec la France et l’Europe ?

Il est sûr que le nouveau président aura moins de respect pour ses vieux alliés européens, dont la France, qui risquent d’être davantage à l’épreuve. L’Europe devra s’organiser. Quand je dis l’Europe, c’est surtout l’Allemagne et la France pour définir une attitude commune car la Grande-Bretagne se retrouve pour longtemps écartée de toute influence internationale. Si la France et l’Allemagne ne sont pas capables de parler d’une même voix pour exprimer une politique commune sur les grands sujets, cela risque de poser problème.

Un certain nombre de traités sont en question, en négociation, en processus de ratification (Cop 21, Tafta…). Peut-il y avoir une en remise en cause ?

Sur un point, Trump a été clair. Il a déjà dit qu’il ne voulait pas de la COP 21 sur le climat, que ce n’était pas un traité, et d’ailleurs que le Sénat américain, qui ratifie les traités – aux Etat-Unis, ce n’est pas le président –, ne l’aurait pas fait.

II y a les dossiers sensibles du terrorisme, la Syrie, l’Irak. Trump prône l’isolationnisme, avec quelles conséquences ?

Il faudra de toute façon que le nouveau président compose avec tous les éléments institutionnels de la diplomatie américaine. Il ne sera pas seulement un homme fort ou une grande gueule. Il pourrait s’entendre avec la Chine par exemple dans une stratégie à long terme. Sur le problème syrien, l’establishment a les clés, le problème de la Syrie et de l’Irak, par effet de conséquence, se règle au niveau de la Turquie, membre de l’Otan, l’Iran et l’Arabie saoudite. Quant au Proche-Orient, on remarque qu’on ne parle plus du problème israélo-palestinien.

Le caractère provocateur, «à l’emporte-pièce» de Donald Trump, mis en exergue par ses déclarations pendant la campagne peut-il donc être «contrôlé» par l’administration ?

L’establishment va jouer son rôle pour lisser la politique étrangère. Mais dans le même temps, Donald Trump peut dire : «J’ai un mandat du peuple américain». Ce qui n’était pas évident avant, avec Barack Obama, l’est davantage aujourd’hui, parce que le Congrès est aussi républicain. Cela dit, je crois que pour mieux connaître la politique étrangère mise en œuvre par Trump, il ne faut pas se baser sur ses déclarations de campagnes mais plutôt sur ses futures déclarations. Il a déjà commencé à changer, d’ailleurs, dès son élection. Dans sa première déclaration, il s’est posé en rassembleur. Alors…

Recueilli par D.H.
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