ANALYSES

Politique étrangère : le bilan discuté d’Obama

Presse
8 avril 2016
Barack Obama quittera la Maison-Blanche en janvier 2017, après huit années d’une présidence durant laquelle la situation sécuritaire mondiale n’a cessé de se dégrader, à l’image des attentats de Bruxelles, Paris, San Bernardino, Tunis, Djakarta, Istanbul, Beyrouth…

Le récent déplacement du président américain à La Havane a bien sûr couronné de succès l’ouverture des États-Unis vers Cuba. Obama peut également s’attribuer une partie du mérite quant à l’accord nucléaire avec l’Iran et la COP 21 (même si l’Europe et la France revendiquent légitimement ces deux derniers succès). Pourtant, le bilan d’Obama en matière de politique étrangère est loin de faire l’unanimité. En atteste le débat suscité par le très long entretien accordé par le Président à la revue The Atlantic dans son édition de mars. Le texte reflète ses choix très personnels, au cours de ses deux mandats, dans le domaine des relations internationales.

Concernant la Syrie, le fait marquant reste la décision de la Maison-Blanche de ne pas intervenir militairement en août 2013, tandis que la France était prête à suivre, sous prétexte que la guerre en Irak lancée une décennie plus tôt par George W. Bush avait été un échec et avait causé de nombreux morts parmi les soldats américains. Ce choix s’est traduit par le désastre humanitaire des cinq dernières années. Obama revendique cette décision, au prétexte que « les États-Unis ne peuvent pas tout ». Mais les crises actuelles, pourtant, ne se résoudront pas d’elles-mêmes.

Un monde plus en paix ?

Le Président se décrit comme un partisan des Nations unies et de l’ordre international, mais aussi de l’implication américaine dans ces deux domaines : « Je veux un président conscient qu’il ne peut pas tout régler, mais notre présence fait la différence : tous les sommets auxquels j’ai participé l’ont montré », dit-il dans l’interview, citant le nucléaire iranien, le système financier international ou le climat. Revenant en détail sur l’intervention en Libye en 2011, Obama déclare « qu’il faisait peut-être trop confiance aux Européens « pour faire le suivi de cette intervention ». Et de mentionner la défaite de Nicolas Sarkozy à la présidentielle de 2012, « le désintérêt » de David Cameron… Bref, un fiasco qui fait aujourd’hui de la Libye l’un des terreaux du djihadisme salafiste.

Mais au lieu de faire la moindre auto-critique, Barack Obama accuse les Européens et les pays arabes d’être des free-riders (profiteurs), relayant hélas le discours de certains candidats républicains, comme Donald Trump qui appelle au désengagement de l’Amérique face aux « coûts énormes » de l’alliance transatlantique. Très critique vis-à-vis de l’Arabie Saoudite, Obama demande à celle-ci de « partager le Moyen-Orient » avec son ennemi iranien. Quant à Vladimir Poutine, il est curieusement épargné, même s’il « fait fausse route ».

Barack Obama témoigne d’un grand intérêt pour l’Asie-Pacifique depuis l’invention du terme « pivot asiatique » au début de sa présidence. Selon lui, c’est dans cette région que se trouvent les intérêts des États-Unis, et c’est là que se trouve le concurrent – ou partenaire ? – principal : la Chine. Se souvient-on encore de l’attribution du Prix Nobel de la paix à Barack Obama en 2009, moins d’un an après son élection ? Aujourd’hui, on peut s’interroger sur le choix que feraient les membres du jury. Le monde est-il davantage en paix après deux mandats sous sa présidence ? Rien n’est moins sûr.
Sur la même thématique