ANALYSES

La victoire des afro-optimistes

Presse
9 juillet 2010
Pascal Boniface - Le Monde

Stades vides, violence dans les rues, agressions contre les supporteurs venus assister aux matches, risque de viol pour les supportrices, menace d’attentats terroristes à l’image de ce qui s’était passé pour la Coupe d’Afrique des nations en Angola, interrogations sur l’hôtellerie et les transports… c’est peu dire que le scepticisme régnait avant le coup d’envoi du Mondial en Afrique du Sud.


Un pays africain serait-il en mesure d’organiser le premier événement médiatique de la planète ? La Fédération internationale de football (FIFA) n’avait-elle pas cédé au politiquement correct en voulant que le continent africain ne soit pas l’éternel exclu de ce type d’honneur, mais aussi de responsabilités ? Le souci louable de récompenser le symbole qu’est le démantèlement pacifique de l’apartheid n’allait-il pas devenir un cauchemar organisationnel et faire au contraire une contre-publicité à l’Afrique, au lieu de l’aider ? Au vu des difficultés que l’Union des associations européennes de football (UEFA) rencontre en Ukraine avec l’organisation de l’Euro 2012 (co-organisé avec la Pologne), n’aurait-il pas été plus confortable de recourir à des valeurs sûres, des pays développés, aux sociétés stables et aux infrastructures déjà largement existantes ? Les propos des oiseaux de mauvais augure ont été démentis.


Tout d’abord, cette Coupe du monde a été une fête. A quelques exceptions près, tous les matches se sont déroulés dans des stades abondamment remplis, à tel point que l’édition 2010 devrait monter sur le podium des affluences record. Les tribunes ont été chaleureuses et bigarrées, spectateurs sud-africains, hauts en couleur, se mélangeant avec les supporteurs étrangers, qui rivalisaient autant dans les tribunes pour leurs accoutrements sympathiques que leurs équipes le faisaient sur le terrain pour remporter le match. Pas de bagarres dans les stades, pas de violences dans les rues. Ceux qui craignaient des stades vides et silencieux se sont mis à se plaindre du vacarme des vuvuzelas, qui resteront le symbole de ce Mondial.


On disait que l’Afrique du Sud, ce n’était pas l’Afrique. On a vu, au contraire, une grande solidarité continentale, les Sud-Africains prenant fait et cause pour toutes les équipes africaines, puis pour celle du Ghana, après l’élimination des Bafana Bafana. La fréquentation touristique a augmenté, et les reportages sur l’Afrique du Sud devraient permettre au pari des organisateurs de passer de 8,5 millions de visiteurs à 10 millions par an d’être atteint. Les stades sont des bijoux et de parfaites réussites architecturales, même si certains auront du mal à conserver une rentabilité après la fin du Mondial. Bref, c’est le visage d’une Afrique à la fois ouverte et dynamique, hospitalière et moderne, qui a été donnée. Le football va franchir un nouveau cap en Afrique, et la perception que le reste du monde a du continent va s’améliorer. Dans la bataille entre afro-pessimistes et afro-optimistes, ce sont les seconds qui ont gagné

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