ANALYSES

« Attaquer l’Iran ne règlera pas le problème »

Presse
27 septembre 2012
Thierry Coville - Direct Matin

Netanyahou réclame le soutien des Etats-Unis pour lancer des frappes préventives sur les installations nucléaires de son ennemi, Téhéran étant soupçonné de développer l’arme atomique sous couvert d’un programme civil. Toutefois, selon le spécialiste de l’Iran Thierry Coville, chercheur à l’Iris et professeur à Novancia, Israël n’a pas intérêt à passer à l’action.


Les menaces d’Israël vont-elles vraiment se réaliser ?

Je pense que Benyamin Netanyahou bluffe. Israël a raison de s’inquiéter du programme nucléaire iranien mais pas de menacer d’une attaque. Les Israéliens eux-mêmes n’y croient pas. Netanyahou parle fort pour que sa position et ses inquiétudes soient prises en compte.


Quelles conséquences une frappe préventive pourrait-elle avoir ?

Israël ouvrirait la boîte de Pandore et tous les pays musulmans auraient un motif pour s’en pendre à lui. Et il y a aura forcément des conséquences sur les prix du pétrole, qui vont bondir, car l’Iran a déjà affirmé qu’il ferait tout pour perturber le commerce dans le détroit d’Ormuz [par où transite le tiers du trafic pétrolier mondial par voie de mer]. Cela aurait un impact catastrophique sur l’économie mondiale.


Cela suffirait-il à anéantir le programme nucléaire iranien ?

Une attaque ne réglera pas le problème. Au contraire. Cela encouragera l’Iran à se doter de la bombe atomique. Et si Israël détruit les sites d’enrichissement, l’Iran les reconstruira et le régime restera en place. Par contre, on ne parle pas assez des risques liés à radioactivité qui peut se dégager en cas d’attaque d’un site où l’on enrichit de l’uranium. Cela entrainerait une véritable catastrophe humanitaire, qui pourrait dépasser les frontière iraniennes.


Est-on sûr, aujourd’hui, que Téhéran veut se doter de la bombe nucléaire?

Il n’y a aucune preuve objective et concrète que l’Iran cherche à se doter de la bombe atomique. Un chef de l’armée l’a d’ailleurs récemment déclaré [le chef d’état-major de l’armée israélienne, le général Benny Gantz, en avril, ndlr]. Et sur ce dossier, le régime islamique a le soutien de sa population, qui pense que l’Iran ne doit pas céder face aux puissances occidentales. C’est une question de nationalisme.

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