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Nucléaire iranien : « Chaque partie peut revendiquer la victoire »

Presse
24 novembre 2013

Samedi, à Genève, les Occidentaux sont parvenus à un accord qualifié "d’historique" avec l’Iran sur son programme nucléaire. Karim Pakzad, chercheur à l’Institut de relations internationales et stratégiques (Iris) spécialiste de l’Iran, livre son analyse à metronews.


L’accord obtenu par les Occidentaux sur le nucléaire iranien est-il réellement historique ?



Je n’hésite pas à le qualifier d’historique, oui. Il a été obtenu après dix ans de négociations, de ruptures et de relances. Il va mettre fin à un conflit de trente-cinq ans entre l’Iran et certaines grandes puissances. Les négociations ont d’ailleurs montré une complicité extrêmement importante entre les Etats-Unis et l’Iran. Dans certains milieux diplomates bien informés, on est même sûrs que les éléments essentiels ont été négociés de manière bilatérale entre les deux pays dès le mois de juin (ndlr : qui correspond à l’élection du président iranien modéré Hassan Rohani).


Pourquoi la situation s’est-elle enfin débloquée ?



D’abord, grâce à la volonté américaine de se désengager au Proche-Orient, tout en essayant de garantir une stabilité dans la région. Tous les pays occidentaux savent que sans l’Iran, on ne peut rien faire dans la zone. Le pays a tous les atouts d’une grande puissance régionale, par sa population, ses ressources énergétiques et surtout sa matière grise. Et puis, Hassan Rohani a compris que l’Iran ne peut plus se permettre d’être en conflit avec l’ensemble de l’Occident. Fait inédit, il a même ouvertement déclaré que les sanctions infligées par l’Occident ont vraiment pesé sur la situation du pays.


Qui sont les grands gagnants de cet accord ?



Un diplomate américain sous couvert d’anonymat a dit une chose extrêmement importante pendant les négociations : "On est d’accord sur tout. Mais il faut que chaque partie trouve des formules pour convaincre l’opinion publique qu’il a gagné." Les Américains ont obtenu l’arrêt de l’enrichissement de l’uranium à 20 %, et les Iraniens peuvent de leur côté continuer leur programme nucléaire civil en limitant le taux à 5 %. Il y a donc des éléments qui permettent à chaque partie de revendiquer la victoire.


Pensez-vous que l’accord puisse être durable ?



Je pense qu’il pourrait tenir, mais en même temps, il ne faut pas être dupe, c’est un accord intérimaire d’une durée de six mois. Et il y a d’autres dossiers importants entre les Etats-Unis et l’Iran qui ne sont pas encore réglés. Barack Obama et Hassan Rohani ont besoin de temps pour convaincre leurs peuples, et surtout ne pas provoquer les radicaux en Iran et les néo-conservateurs aux Etats-Unis. Ce n’est donc qu’une première étape. Mais qui reste historique.

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