ANALYSES

L’enjeu francophone

Presse
17 janvier 2014
Interview de Pouria Amirshahi, président de l’IRIS, par Christophe Lucet

Pouria Amirshahi, nouveau président de l’Institut de relations internationales, il plaide pour un espace francophone plus cohérent


Vous prenez la présidence de l’Institut de relations internationales et stratégiques(Iris). Quels sont vos objectifs ?



On parle peu de politique internationale en France. L’Iris est un outil qui doit éclairer les pouvoirs publics et les citoyens, loin des lobbys, sur les enjeux géopolitiques. Nos analyses doivent aider à la décision et pousser l’éducation populaire. L’institut est aussi un lieu de formation et d’études au niveau reconnu à l’étranger. C’est un atout pour former plus de cadres aux enjeux internationaux, au-delà des diplômés des grandes écoles.


La présence française au Maghreb et en Afrique de l’Ouest – votre circonscription – est-elle à la hauteur de nos liens historiques ?



Il faut travailler sur trois axes : dynamiser le projet méditerranéen et la relation latino-maghrébine ; agir sur le co-développement euro-africain ; consolider l’espace francophone, d’Abidjan à Montréal en passant par Bruxelles, Rabat, Paris, Dakar et Alger. Pour cela, Il faut passer par des projets concrets, pragmatiques réseaux éducatifs, industries culturelles, stratégie agricole en partage. Le fonds de 20 milliards d’euros annoncé par le président de la République va dans la bonne direction. 235 000 Français vivent en Afrique : cette diaspora est un atout formidable. Plus de 61 000 entreprises françaises ont exporté vers l’Afrique subsaharienne en 2012, dont 70% de PME. Mais on ne peut éluder la question de la mobilité des personnes, qui est associée de façon paranoïaque du risque migratoire façon paranoïaque au risque migratoire. Or, si on veut une relation plus forte, il faut qu’étudiants, chefs d’entreprise, artistes, scientifiques puissent aller et venir.


Y a-t-il un risque à prolonger notre présence militaire au Mali ?



Cela dépend du développement du pays, de la restauration de l’État et de ses services publics. Les efforts pour l’intégration économique des États d’Afrique de l’Ouest (la Cedeao) sont aussi importants que les pourparlers avec les factions du Nord. La crise malienne vient aussi d’une crise de confiance entre les habitants et les pouvoirs publics. Notre pays veut faciliter ce retour de la confiance.


Quel est l’enjeu pour le sommet de la francophonie de Dakar 2014 ?



Rendre cohérent l’espace francophone, sinon c’est l’effacement programmé. L’alliance des 20 pays vraiment francophones est nécessaire sur la nouvelle carte des espaces géoculturels et linguistiques. Et les Français ne sont pas les plus avancés. L’avenir des francophones du monde passe par Dakar…et par des moyens stratégiques. Abdou Diouf [secrétaire général de la Francophonie] a réussi le pari d’une vraie organisation internationale, place maintenant aux grands projets. Le plus important est celui de la francophonie économique.


Vous voyez dans l’expatriation de jeunes Français un facteur de rayonnement. Mais n’est-elle pas aussi le signe d’un blocage ici ?



Si les jeunes sont de plus en plus nombreux à vouloir partir, ils le vivent comme une chance, une envie de découverte, un atout dans la vie professionnelle. Des imbéciles dénigrent la France et appellent à la quitter. Je préfère encourager les jeunes à partir… pour mieux revenir. Eux et le pays n’en seront que plus riches. Élargissons les possibilités à tous les jeunes dans les grandes écoles, les facs, mais aussi dans les licences professionnelles et les filières courtes.


 

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