ANALYSES

« La France va aider le Nigeria » à lutter contre Boko Haram

Presse
6 mai 2014

Enlèvements, attentats sanglants… le Nigeria vit actuellement ses heures les plus sombres. Qu’est-il arrivé à la première puissance économique africaine? Nous avons posé la question à Philippe Hugon, directeur de recherche à l’Iris, en charge de l’Afrique. 

 

Le Nigeria pris dans l’étau de Boko Haram. Depuis janvier, la guerre au Nord, particulièrement dans l’État de Borno, fief de la secte islamiste, a fait plus de 1.500 morts, indique Amnesty International dans un rapport publié le 31 mars.


En avril, puis en mai, deux attentats perpétrés par le même groupe islamiste à Abuja, la capitale, entraînent la mort d’une centaine de personnes. Enfin, l’enlèvement revendiqué par Boko Haram de 276 lycéennes mi-avril, dans le nord-est du pays, suscite l’émoi dans le monde entier.


Comment ce pays, première puissance économique africaine, peut-il tomber aux mains de terroristes? Décryptage avec Philippe Hugon, directeur de recherche à l’Institut de relations internationales et stratégiques (Iris), spécialiste de l’Afrique.


L’enlèvement de jeunes Nigérianes par Boko Haram marque une nouvelle épreuve pour le pays. Les autorités sont-elles impuissantes face à la montée de l’islamisme radical?



Le Nigeria assiste à un renforcement de Boko Haram. A la base, cette secte, dont le nom signifie "l’éducation occidentale est un péché" en langue haoussa, est un groupe islamiste terroriste purement nigérian. Longtemps réprimé par le pouvoir, il revendique la création d’un Etat islamique dans le Nord.


Soupçonné d’avoir tissé des liens avec Al-Qaïda au Maghreb islamique (Aqmi), Boko Haram multiplie ces derniers temps les actions spectaculaires comme l’enlèvement de jeunes filles ou encore les récents attentats. Face à ce déchaînement de violence, ni les services de renseignement nigérians ni les forces régaliennes de police ne parviennent à lutter efficacement. Ce que reproche la population au gouvernement.


Une aide internationale est-elle envisagée?



Absolument. L’appel aux alliés (Etats-Unis, France, Cameroun, Tchad…) a même déjà été lancé. Fin février, François Hollande avait effectué une visite officielle au Nigeria, centrée sur les questions de sécurité, de lutte contre le terrorisme et de diplomatie économique.


De toute évidence, la France va épauler le Nigeria, pays avec lequel elle a des intérêts communs. Mais surtout un combat commun, celui de la lutte contre le jihad. Et puis, pour rappel, le Nigeria avait aidé la France dans son intervention au Mali.


Le Nigeria accueille cette semaine le "Forum économique pour l’Afrique". Les récents événements peuvent-ils être un frein au développement économique du pays? le sommet risque-t-il d’être menacé?



Si le Nigeria est devenu la première puissance économique de l’Afrique, le pays n’en demeure pas moins un paradoxe. C’est le cas du Brésil, on peut être une puissance économique et être gangréné par la violence. Les deux peuvent aller de pair. Cela ne remet pas en cause le développement économique du pays.


Le Nigeria est un pays capitaliste, avec de forts intérêts financiers, et qui dispose d’importantes ressources pétrolières. Le problème vient de la corruption, des violences religieuses, et des enjeux de pouvoirs entre le Nord et le Sud… Mais cela n’empêchera pas le Forum de se tenir. La sécurité s’en trouvera simplement renforcée.

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