ANALYSES

Visite du Premier ministre français en Chine : quel bilan ?

Interview
9 décembre 2013
Le point de vue de Philippe Le Corre
Quels étaient les enjeux principaux de cette visite ?
Il s’agissait de montrer l’attachement français aux relations avec la Chine à quelques semaines du 50ème anniversaire de la reconnaissance de la RPC (République populaire de Chine) par le général de Gaulle, le 27 janvier 1964. L’année 2014 sera marquée par diverses célébrations, notamment dans le domaine culturel, et le point d’orgue de l’année sera la visite en France du président chinois Xi Jinping, au printemps. La visite de Jean-Marc Ayrault a permis de lancer officiellement les festivités. D’une durée exceptionnellement longue (quatre jours), ce périple qui l’a conduit dans plusieurs villes chinoise a aussi permis de faire oublier le passage un peu trop rapide de François Hollande au printemps dernier. Enfin, il est clair que la France ne figurait pas jusqu’ici dans les priorités des entreprises chinoises en matière d’investissement. Malgré l’aéronautique et les produits de luxe, le déficit commercial en faveur de la Chine est élevé. La France veut profiter de 2014 pour créer de nouvelles opportunités pour les entreprises hexagonales dans des domaines comme la santé, l’agro-alimentaire voire l’automobile. Ce n’est pas par hasard si le Premier ministre s’est rendu à Wuhan, la ville où est installée l’usine de PSA.

Il a beaucoup été question dans les médias du nucléaire français. Quels sont les autres atouts de la France sur le marché chinois ?
La France a la chance de posséder de grandes marques dans les domaines de la mode, des cosmétiques, de la gastronomie, mais aussi de l’énergie, de l’environnement et des transports. La plupart des grandes entreprises françaises dans ces secteurs sont présentes en Chine, mais la difficulté est de stimuler l’intérêt de nos PME, parfois plus frileuses à l’international. Nombre de nos produits ne sont pas encore en Chine: il faut trouver un moyen de les aider à s’y développer. Autre domaine qui nous caractérise: la gestion des activités culturelles (musées, salles de spectacle, etc…) et l’éducation artistique. Ce sont des points forts qu’il faut encourager.

Ce voyage de Jean-Marc Ayrault intervient une semaine après celui du Premier ministre britannique. Quelle est la nature de la concurrence entre la France et la Grande-Bretagne en Chine ?
La concurrence entre les deux pays existe, mais elle existe encore plus entre la France et l’Allemagne, numéro un incontestable parmi les pays européens des relations économiques avec la Chine. Non seulement l’Allemagne est reconnue comme un partenaire économique fiable sur le marché chinois (en atteste la part de marché de ses entreprises), mais la Chine a récemment effectué des investissements significatifs en Allemagne, ce qui n’est pas encore le cas en France. Quant à la Grande-Bretagne, elle entretient avec la Chine des relations en dents de scie: ancienne puissance coloniale à Hong Kong (ce qui a longtemps entravé le développement de relations durables), elle attire de nombreux financiers chinois à la City. Ces derniers sont séduits par les services britanniques, par la langue anglaise et par la facilité de faire des affaires en Grande-Bretagne. Il y a encore plus d’étudiants chinois en Grande-Bretagne qu’en France. Et depuis peu, les autorités britanniques ont facilité l’obtention des visas pour les étudiants chinois notamment. La France doit améliorer son image dans le domaine économique, tout en renforçant ses côtés positifs : culture, gastronomie, santé, agriculture, environnement…
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