ANALYSES

Quels enjeux pour la Chine à l’heure du 18ème Congrès du Parti communiste chinois ?

Interview
8 novembre 2012
Le 18ème Congrès du Parti Communiste Chinois s’ouvre aujourd’hui jeudi 8 novembre et doit durer jusqu’au 14 novembre. Quels sont les objectifs de ce Congrès ? Quel est le fonctionnement de celui-ci ?

Les objectifs de ce Congrès ne sont pas réellement la désignation de la future direction du Parti Communiste Chinois (PCC) puis de l’Etat chinois puis de l’armée chinoise, mais d’entériner des décisions qui ont déjà été prises d’une manière ou d’une autre au cours de réunions tout à fait informelles. Il y aura quand même des discussions, sans doute à huis clos, des discussions assez vives. Tout le monde est autorisé à s’exprimer dont les centaines de délégués présents, toujours derrière des « portes fermées » et nous ne saurons pas ce qui s’est passé. Les discussions peuvent aller assez loin avec des revendications locales qui très souvent se superposent à des revendications nationales. Ensuite, il y a un moment où le chef siffle la fin de la partie et dit « c’est terminé, maintenant vous êtes priés d’entériner les décisions qui ont été prises. Ce que vous avez dit, nous en tiendrons compte », et puis, en quelque sorte, ça s’arrête là. Le Congrès du PCC permet également de faire des rencontres interprovinciales et interministérielles qui ne peuvent avoir lieu dans d’autres occasions.

Quel bilan peut-on tirer des dix années de présidence de Hu Jintao ?

Hu Jintao, qui avait été faussement présenté à son arrivée comme quelqu’un d’extrêmement fort et capable de gérer la Chine d’une main de fer, puisqu’il avait été l’homme de la répression au Tibet, s’est révélé finalement un président relativement mou, cherchant surtout à éviter les confrontations. Il a eu à gérer -et il l’a fait relativement bien-, un certain nombre d’affaires, en particulier le tremblement de terre au Sichuan. Il a évité un krach de la Chine sur le plan économique mais à l’heure actuelle, il n’a pas réussi à transformer le modèle chinois, à créer une consommation intérieure. Il n’a pas réussi non plus à régler les problèmes d’environnement, ni à régler les problèmes de société. La fracture sociale est de plus en plus violente en Chine. Il laisse donc de grands défis à ses successeurs.
Quels sont justement les grands défis qui attendent les futurs cadres du PCC et, à plus forte raison, le président ?

Les grands défis pour le Parti Communiste Chinois, pour le gouvernement, et pour l’armée -puisqu’il s’agit de la même chose-, seront de gérer l’atterrissage d’une économie totalement tournée vers l’exportation et la transformer en une économie plus tournée vers l’intérieur.
Il faut également empêcher la fracture sociale : les dynasties en Chine s’effondrent systématiquement quand il y a une perte de solidarité à l’intérieur du pays. Or, à l’heure actuelle, la solidarité est en train de disparaître à l’intérieur du pays. Il y a une petite classe qui est riche, voire même très riche, et tout le reste du pays ne bénéficie pas du tout des richesses de la même manière. Il y a bien une classe intermédiaire mais elle est trop peu importante. C’est un défi qu’il va absolument falloir gérer, et ce sera très difficile.
Il s’agira également de relever le défi de l’amélioration du fonctionnement de la Chine à l’international. Pour le moment, le pays ne se comporte pas correctement dans beaucoup de domaines : respect des droits de l’homme, respect des propriétés intellectuelles et industrielles, respect d’un certain nombre de règles économiques, respect de la souveraineté des autres pays -en particulier en Mer de Chine méridionale-, tentative d’utilisation d’arrogance et d’imprécation au lieu de la discussion… tout cela devra être réglé. Si une partie du Parti Communiste voudrait travailler sur l’amélioration de ces dossiers, il y a également une grosse partie du PCC, essentiellement les gouvernements locaux, qui ne veulent absolument pas sortir d’une Chine « impériale » qui ne respecte pas les règles du jeu internationales.