ANALYSES

« Quoique souverain, le Kosovo reste très entouré.»

Tribune
12 septembre 2012
Le Kosovo a accédé ce lundi à la pleine souveraineté. Qu’est-ce que cela signifie ?
Effectivement, quatre ans et demi après avoir proclamé unilatéralement son indépendance, le Kosovo est désormais théoriquement pleinement souverain. Le Groupe d’Orientation sur le Kosovo comme le Bureau Civil International, organes de tutelle depuis 2008, vont être dissous. En effet, l’indépendance de cette ancienne province serbe, peuplée à majorité d’albanophone, s’était faite sous conditions imposées par la communauté internationale, d’une part pour s’assurer que les droits des minorités, notamment serbe, soient garantis dans le nouvel Etat mais aussi pour encadrer la classe politique. La Communauté internationale maintient cependant de gros stabilisateurs dans ce territoire grand comme la Gironde : le mandat de la Kfor (les forces de l’OTAN) est maintenue tout comme ceux d’EULEX, la mission police-justice de l’UE, et de l’OSCE. Quoique souverain, le Kosovo reste très entouré.

Cette souveraineté est-elle effective ?
Oui et non. Oui, globalement sur la plupart du territoire et même dans les enclaves serbes situées au sud du territoire. En revanche, le Kosovo n’est toujours pas souverain dans le Nord du pays, adossé à la Serbie et peuplé majoritairement de Serbes qui refusent l’autorité de Pristina et ignorent la Communauté internationale qui les enjoint à se soumettre au gouvernement kosovar.

Quelle est la réalité socio-économique du Kosovo aujourd’hui ? Un Etat est-il viable sur le long terme ?
Il est difficile de dire si un Etat peut être viable. Le Kosovo n’a malheureusement pas eu beaucoup de bonnes fées qui se sont penchées sur son berceau. Province historiquement la plus pauvre de l’ex-Yougoslavie, le Kosovo reste un des pays les plus pauvres d’Europe. Il ne peut s’appuyer que sur peu de ressources naturelles et les investissements étrangers ne sont pas nombreux. Comme les autres pays des Balkans, la crise économique a frappé de plein fouet une économie balbutiante et déjà sinistrée dont la force principale est la jeunesse et le dynamisme de sa population.

Une présence internationale est au Kosovo depuis 1999. Quel est le bilan de son action ?
Le premier bilan positif est d’avoir réussi à ce que le conflit ne reprenne pas. En revanche, après 13 ans de présence internationale massive sur un territoire de moins de 2 millions d’habitants, le bilan est plus que mitigé. Une question se pose : quel est le prix de cet engagement massif et au long cours de la Communauté internationale ?

Les Balkans restent-ils un enjeu pour l’UE ?
Le Kosovo et les autres pays des Balkans sont un enjeu pour l’UE, tout simplement parce qu’ils sont déjà européens. Deux tiers des échanges commerciaux des Balkans se font avec l’UE. La Croatie sera le prochain Etat membre en juillet prochain et le processus d’intégration est en cours à des degrés divers pour chaque pays de la région. Les Balkans sont bien plus que des voisins de l’UE.