ANALYSES

La réforme de l’assurance santé : le test pour Obama

Tribune
3 juillet 2009
« Stars are aligned »

A la Maison Blanche, le moment est considéré comme idéal pour lancer cette réforme. Mais c’est surtout que cela ne peut pas attendre. A la fois parce qu’il faut profiter de la popularité encore grande du nouveau président et parce qu’il faut aller vite, avant que les membres du Congrès ne commencent à s’inquiéter des élections de mi-mandat, à l’automne 2010. A peine plus de la majorité des Américains (51%) soutiennent le plan de santé Obama. La crainte d’un Etat trop interventionniste et d’un alourdissement des déficits est encore très palpable. Malgré le ton optimiste d’Obama, tout le monde n’est pas encore convaincu.

Pourtant, la santé coûte très cher aux Etats-Unis, ce qui a des conséquences à la fois sur les conditions de vie des Américains, qui ont de moins en moins les moyens de se soigner, et sur la dette nationale, qui augmente de jour en jour, notamment du fait de l’explosion des coûts. C’est d’ailleurs l’un des principaux arguments de Barack Obama : au rythme actuel, les dépenses de santé pourraient représenter 28% du PIB américain en 2030, contre 18% aujourd’hui, et une famille moyenne pourrait avoir à débourser près de 25 000$ pour s’assurer en 2030, contre 12 000$ aujourd’hui. La réforme devrait donc permettre de maîtriser la hausse des coûts et d’améliorer le système de santé.

Réforme ambitieuse

Les chiffres sont connus : environ 47 millions d’Américains sont dépourvus d’assurance maladie, nombre qui devrait augmenter du fait de la crise économique et la hausse du chômage (la couverture maladie étant souvent liée à un emploi). En outre, 25 millions d’Américains seraient « sous-assurés ».
Etant donné la complexité du système de santé américain et la multiplicité des opinions sur la façon dont doit être menée la réforme, la tâche est ardue. L’administration doit à la fois convaincre Républicains et Démocrates et mettre d’accord l’industrie pharmaceutique et les assureurs.

Les points majeurs de la réforme sont :
– Responsabiliser les Américains par rapport à la santé, en s’appuyant sur un système public-privé (et non un système entièrement public, qui n’incite pas les assurés à faire des économies).
– Réduire le prix des médicaments prescrits.
– Développer une assurance maladie de qualité et abordable pour chaque Américain.
– Empêcher les compagnies d’assurance de refuser une couverture sur la base de conditions préalables.
– Créer un fond national des assurances qui pourrait faire la concurrence aux compagnies de sécurité privés ( à l’exemple du Medicaid et Medicare).

Face à de telles ambitions, la crainte, notamment des opposants à la réforme, est de voir l’Etat jouer un rôle plus grand sur les questions de santé – dans un pays toujours très méfiant face à un interventionnisme étatique – et de voir le déficit se creuser, alors même que la crise économique pénalise déjà les finances américaines.

Barack Obama est pour sa part intimement convaincu de la nécessité de réformer le système de santé américain. Il souhaite d’ailleurs conduire une véritable réforme de fond, et ne pas seulement apporter des modifications cosmétiques au système actuel.

Apprendre des leçons du passé

Obama n’est pas le premier à vouloir réformer le système de santé américain. L’administration Clinton avait eu la même priorité au début des années 1990. Mais la réforme avait rencontré l’opposition du Congrès, notamment parce qu’elle avait été principalement préparée par des experts, et non par les parlementaires. L’administration Obama a aujourd’hui appris des échecs de l’administration Clinton.
Cette fois-ci, les membres du Congrès sont particulièrement impliqués dans l’élaboration de la réforme. Au Sénat, le Senate Health, Education, Labor and Pensions (HELP) Committee, mais également le Senate Finance Committee sont déjà au travail. A la Chambre des Représentants, les trois présidents des commissions en charge du projet de réforme (Henry Waxman pour le House Energy and Commerce Committee , Charles Rangel pour le House Ways and Means Committee et George Miller pour le House Education and Labor Committee ) ont d’ores et déjà fait des propositions pour cette réforme.

La réforme de l’assurance santé aux Etats-Unis constitue l’une des principales promesses de campagne de Barack Obama. Mais le contexte économique rend l’adhésion à la réforme plus difficile, cette dernière étant très coûteuse. La refonte du système de santé est pourtant présentée comme vitale pour le redémarrage économique des Etats-Unis.
Le temps est donc compté pour la nouvelle administration, qui ne veut pas passer à côté de l’occasion de laisser sa trace dans l’histoire.