ANALYSES

Obama, Romney et la politique énergétique

Tribune
21 septembre 2012
Ces changements fondamentaux ne sont pas le produit d’une politique énergétique volontariste d’Etat. Ils sont le fruit de l’application à échelle industrielle de techniques de forage horizontal et de fracturation hydraulique et de l’existence aux Etats-Unis d’un terreau favorable : opportunités géologiques, compétences technologiques, faible sensibilité environnementale, capacités financières abondantes. A ce jour, il apparaît improbable de réunir ces conditions dans d’autres pays.

Le volet énergie du programme électoral de Romney surfe sur la vague du renouveau de la production d’hydrocarbures et appuie cette tendance avec force et donne peu d’importance aux énergies renouvelables et aux problématiques liées au changement climatique: transfert du processus d’autorisation d’exploration du niveau fédéral aux simples états afin de le rendre plus rapide; reprise des prospections offshore sur certaines zones de la Côte Est comme la Virginie ; autorisations de projets de pipelines.

Néanmoins – au-delà des effets d’affichages marketing – il est improbable que l’élection de Romney ou le maintien d’Obama aient des conséquences structurantes sur le développement de l’industrie pétrolière américaine, notamment à cause des compromis que n’importe quel Président devra faire avec la Chambre des Représentants et le Sénat. L’essor de l’industrie pétrolière américaine est destiné de toute manière à continuer dans les prochaines années, ayant comme conséquence un impact positif pour l’économie domestique (notamment vis-à-vis des économies de l’Union Européenne ou du Japon, beaucoup plus exposées aux importations d’énergie). Les Etats-Unis bénéficieront de prix domestiques bas pour le charbon et le gaz naturel, le prix de ce dernier se situant désormais entre2et 3 $/MBTU par rapport à des prix de l’ordre de 10 à 15 $/MBTU en Europe et en Asie. La hausse de la production d’huile de schiste – par exemple dans le Dakota du Nord – continuera de peser sur les prix du brut dans la zone Mid Continent (voire sur le Golfe du Mexique pour les bruts légers). Et la part du pétrole importé baissera autour de 40% de la consommation domestique. Mais ces évolutions auront des conséquences limitées sur l’évolution mondiale des prix du pétrole.

Les prix internationaux du pétrole et des produits raffinés (qui sont les prix de référence sur les côtes des Etats-Unis et qui influencent aussi les prix du gaz en Europe et en Asie) continueront à être dictés par les tendances de long terme qui sont la rareté et le renchérissement des ressources et l’augmentation de la demande des pays émergents. Et les facteurs de court terme plus à même d’impacter les prix du pétrole se situent toujours dans les pays producteurs du Moyen-Orient : la volonté de l’Arabie Saoudite de maintenir un haut niveau de production, les évolutions politiques et industrielles en Iraq, les tensions autour de l’Iran entre sanctions financières et commerciales et risques militaires…

Or, c’est sur le terrain des relations internationales que les différences entre Obama et Romney pourraient être les plus significatives. La présidence Obama a été perçue au Moyen-Orient comme responsable et adepte du compromis. Les positions de Romney donnent un ton nettement plus agressif – annulation des coupes décidées par Obama au budget de le Défense, attitude plus ferme vis-à-vis de l’Iran, appuis à Israël même en cas d’attaque israélienne contre l’Iran – et risquent de provoquer un regain de tensions.

Actuellement Obama est considéré favori par la plupart des observateurs. Quelles pourraient être les conséquences d’un éventuel succès de Romney sur les prix du pétrole? Il est probable que l’impact le plus sensible sera lié à l’image internationale de Romney , qui pourrait contribuer à l’augmentation de la composante « prime de risque géopolitique » du prix du pétrole. Or, étant donné le caractère mondial du prix du pétrole, ces conséquences ne manqueront pas de se faire sentir aussi en Europe et en France…
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