ANALYSES

Pacte vert européen : des pistes à trouver au Royaume d’Orange ?

Presse
31 janvier 2020
Depuis longtemps, les Pays-Bas impressionnent par leur capacité à se projeter vers l’avenir et le monde. L’étroitesse géographique du pays, qui lui impose de trouver de l’espace sur la mer, contraste avec la taille de son influence : 17e PIB mondial, hub logistique incontournable du continent avec le port de Rotterdam et l’aéroport d’Amsterdam et plusieurs firmes internationales de premier plan. Des performances étonnantes pour une nation de 17 millions d’habitants. A croire que les petits États sont parfois mieux taillés pour exprimer de la puissance sans attirer véritablement l’attention !

Etat fondateur de l’Union européenne, les Pays-Bas ont largement bénéficié de la PAC pour augmenter leurs productions et devenir un acteur agroalimentaire de premier plan. Fort d’une alchimie réelle entre pouvoirs publics, entreprises privées et recherche scientifique, le secteur incarne à lui seul l’état d’esprit hollandais, à la fois marchand et conquérant.

Avec 95 milliards de dollars de ventes réalisées en 2018, les Pays-Bas sont le second exportateur agroalimentaire mondial. Grâce à sa connectivité avec la planète, le Royaume constitue une place centrale du commerce européen et international, réexportant bon nombre de matières premières débarquant sur son territoire (trois-quarts vers des clients européens, dont 25 % pour la seule Allemagne). Outre l’élevage et les produits laitiers, le pays s’appuie sur un secteur semencier important et un pouvoir horticole solide, qui produit et surtout transforme : Amsterdam capte 70 % des fleurs échangées sur la planète !

Agriculture circulaire. Préoccupations climatiques, exigences inédites des consommateurs urbains, controverses à propos des bienfaits de la mondialisation, vieillissement et marginalisation des agriculteurs : ces réalités françaises sont aussi néerlandaises. Continuer à produire sur de faibles surfaces (1,8 million d’hectares), en ménageant les ressources et avec moins d’intrants, voilà le cap stratégique fixé par les Pays-Bas, où technologie et durabilité cherchent leur complémentarité. Le ministère de l’Agriculture, de la nature et de la qualité des aliments a donc bâti une Vision 2030, dont l’objectif est de positionner le pays à la pointe de l’agriculture circulaire. Les autorités souhaitent que le secteur agricole puisse trouver un meilleur équilibre entre production, économie et environnement.

Le défi est colossal et le seul débat récent autour de l’azote a bien montré la complexité du dialogue entre entrepreneurs agricoles, pouvoirs publics et société civile. La demande de transitions est vive mais le but n’est pourtant pas d’altérer la trajectoire du développement. Rester compétitif est dans l’ADN hollandais. Le document officiel présentant les détails de cette Vision 2030 est d’ailleurs explicite : le renouvellement est le maître-mot. En aucun cas, l’agriculture n’est considérée comme appartenant au passé.

Si l’innovation est attendue pour apporter des solutions, le futur de l’agriculture aux Pays-Bas sera différent. Il s’inscrira dans les pas du Pacte vert, récemment lancé comme dessein global européen et au sein duquel la PAC devra désormais rendre compte. Le néerlandais Frans Timmermans, Premier vice-président exécutif de la Commission, détenant le portefeuille dédié à la lutte contre le changement climatique, est le chef d’orchestre de cette grande partition à jouer. A se demander d’ailleurs si le pacte vert inspirera la Vision 2030 de l’agriculture aux Pays-Bas ou si celle-ci n’est pas au contraire la feuille de route de ce qui attend le continent.
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