ANALYSES

La coalition musulmane anti-Daech créée par Riyad est-elle crédible ?

Presse
16 décembre 2015
« La volonté de l’Arabie saoudite de lutter contre le terrorisme est crédible, elle-même est menacée par celui-ci, à l’intérieur et sur ses frontières. Reste que le terme terrorisme est à géométrie variable. Il ne veut pas dire la même chose pour tous. À l’heure actuelle, les houthistes yéménites sont des terroristes pour Riyad, ils ne le sont pas pour l’Iran. En Syrie, le groupe Al-Nosra, proche d’Al-Qaida, n’est pas un groupe terroriste pour l’Arabie saoudite, il l’est pour les États-Unis.

La coalition mise en place par Riyad est islamique. Elle est composée d’États membres de l’Organisation de la coopération islamique (OCI), basée à Djedda (ouest de l’Arabie saoudite) depuis sa création en 1969. Elle veut faire pendant à la coalition internationale mise ne place par Washington pour lutter contre Daech en Syrie et en Irak.

Riyad veut lutter contre les organisations terroristes qui la menacent, en développant au sein d’une coalition de pays membres un réseau de renseignements efficace, tout en étant indépendante des États-Unis. C’est son objectif principal. Elle n’a pas, je crois, pour but de combattre militairement.

C’est une coalition parfaitement hétéroclite, composée de pays arabes proches du royaume saoudien et d’autres, africains, asiatiques, qui ont peur de certaines dérives extrémistes. Ces derniers pensent que ce qui peut leur amener un peu de moyens d’action ou d’argent est toujours intéressant à prendre. On peut imaginer que des pays comme le Bénin, le Sénégal, qui font partie de la coalition saoudienne, vont peut-être dépêcher une section de Béninois ou une compagnie de Sénégalais sur le terrain, qui seront financés par l’Arabie saoudite.

Cette coalition a aussi un côté idéologique. L’intérêt de l’Arabie saoudite est de mettre en place un ensemble de pays strictement sunnite dont les intérêts sont différents de ceux de la grande coalition anti-Daech emmenée par les États-Unis.

En Syrie, l’objectif de Riyad, c’est d’abord d’en finir avec Bachar Al Assad, et ensuite éventuellement Daech. Et aux yeux de Riyad, tout ce qui renforce les sunnites affaiblit le régime de Damas, d’une façon ou d’une autre. »

Propos recueillis par Agnès Rotivel.
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