ANALYSES

L’occasion pour Van Rompuy de s’imposer

Presse
30 juin 2010
Béligh Nabli - Le JDD.fr

En prenant la présidence tournante de l’Union Européenne le 1er juillet, la Belgique suscite de nombreuses craintes quant à son instabilité politique. Béligh Nabli, directeur de recherche à l’IRIS et spécialiste des questions européennes (*), présente les nouveaux défis qui attendent ce pays si divisé.


Quel bilan peut-on tirer de la présidence espagnole ?

La présidence espagnole aura été délicate compte tenu du contexte de crise que connaissent à la fois l’Union et l’Espagne elle-même. Le bilan n’en reste pas moins globalement positif. Parmi les mesures importantes, il y a d’une part la mise en place du Service européen pour l’action extérieure (SEAE), et d’autre part les décisions relatives au nouveau rôle de la Banque centrale européenne (BCE). Elles laissent entrevoir l’émergence d’un gouvernement économique européen.


Quels dossiers la Belgique aura-t-elle à traiter pendant ses six mois à la tête de l’UE?

Les priorités de la présidence belge s’inscrivent dans le cadre d’un agenda européen que le pays a défini avec les autres Etats membres, ainsi qu’avec les institutions de l’Union. Les priorités de la prochaine présidence s’articuleront autour de ces thématiques: la réponse européenne à la crise, qui doit permettre à l’Union de retrouver durablement le chemin de la croissance et de l’emploi, le renforcement de la cohésion sociale, la préparation de la prochaine conférence des parties à la Convention sur le changement climatique. Elle devra également mettre en œuvre le programme pluriannuel de Stockholm en matière de liberté, sécurité et justice, avec la volonté d’avancer sur l’établissement d’un régime européen d’asile commun ou la reconnaissance mutuelle des décisions de justice. La Belgique aura l’occasion de se mettre directement dans le bain en septembre, avec le développement des relations entre l’Europe et les grands émergents, qui sera le thème central du Conseil européen. Il associera les 27 ministres des Affaires étrangères.


Son instabilité politique peut-elle poser problème à la bonne marche de l’Union Européenne?

En tant qu’État co-fondateur des Communautés et Union européennes, la Belgique possède une longue et solide expérience des mécanismes européens en général, et des présidences du Conseil de l’UE en particulier. Toutefois, cette situation de crise politique interne sera de nature à affaiblir son leadership par rapport aux autres présidences (Conseil européen et la Commission) et par rapport aux grands États membres.


A-t-on déjà vu un pays aussi instable politiquement à la tête de l’Union?

Ce n’est pas la première fois qu’un pays en charge de la présidence tournante du Conseil européen connaît un changement politique en cours de mandat. Au premier semestre 1996, l’Italie a ainsi vu la coalition de centre gauche pilotée par Romano Prodi succéder au gouvernement de centre droit de Lamberto Dini. Au tout début du premier semestre 1993, le Danemark avait entamé son mandat à la tête de l’UE avec la chute du gouvernement Schlüter. Pourtant, l’Europe n’a pas cessé de gérer correctement ses affaires lors de ces présidences. Enfin, plus récemment, le gouvernement tchèque de Mirek Topolanek a du démissionner fin mars 2009, alors même qu’il assurait la présidence du Conseil de l’Union Européenne.


Herman Van Rompuy, président belge du Conseil européen, va-t-il prendre plus d’importance à cette occasion?

C’est en effet une occasion pour Herman Van Rompuy, président belge du Conseil européen de s’imposer un peu plus dans le système politique et institutionnel de l’Union. A l’inverse, la présidence belge du Conseil de l’UE pourrait également s’appuyer sur cet allié de circonstance pour pallier sa faiblesse politique.


Comment la Belgique est-elle vue par les cadres de l’Union Européenne?

La Belgique est au cœur de l’espace politique, institutionnel et administratif de l’Union Européenne. Les Belges sont eux-mêmes bien présents dans le système politico-administratif de l’Union.

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