ANALYSES

« Aucune loi n’interdit aux femmes de conduire en Arabie Saoudite »

Presse
17 juin 2011
Interview de [Karim Bitar->http://www.iris-france.org/cv.php?fichier=cv/cv&nom=bitar], chercheur associé à l’IRIS

Karim Bitar, chercheur associé à l’institut de relations internationales et stratégiques (Iris), spécialiste du monde arabe.


Que vous inspire le mouvement d’aujourd’hui en Arabie Saoudite ?

Les saoudiens ne voient pas au nom de quoi, il devrait rester à l’écart du printemps arabe. C’est un pays très riche, au moment des évènements en Tunisie, le Roi Abdallah se faisait soigner au Maroc. Il est rentré précipitamment dans son pays et a octroyé 36 milliards de dollars d’aides sociales à son peuple mais il a oublié l’essentiel, ces aspirations ne sont pas seulement axées sur des revendications économiques et sociales mais sur une plus grande dignité. Cette revendication des femmes pour qu’elles obtiennent le droit de conduire est très symbolique.


Pourquoi sont-elles frappées par cet interdit ?

Aucune loi n’interdit les femmes de conduire en Arabie Saoudite, ce sont seulement des coutumes ancestrales perpétuées par un clergé obscurantiste et radical très proche du régime, le Wahhabisme.


Que risquent-elles concrètement si elles brisent ce tabou ?

Comme il n’y a pas de lois formelles interdisant la conduite des femmes, la plupart du temps, elle passe 48 heures au commissariat avant d’être relâchées en ayant reçu une leçon de morale. On peut par contre leur poser des soucis en s’attaquant à leur réputation, à leur famille.


Êtes-vous surpris par l’ampleur pris par ce mouvement ?

Il devient viral. Des milliers de Saoudiennes se font filmer en train de conduire et postent dans la foulée la vidéo sur Youtube. La manifestation de demain est peut-être l’avant garde d’une révolution plus importante. Le Roi se méfie de ça. Il a d’ailleurs fait des déclarations conciliantes sur le statut des femmes, laissant entendre une évolution. Mais, il ne veut surtout pas provoquer un appel d’air qui conduirait à des réformes trop importantes. Ils s’appuient donc sur des leaders religieux qui éditent des lois religieuses, des Fatwas surréalistes, afin de garder ses ouailles dans le rang.

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