ANALYSES

« La jeunesse est une denrée rare »

Presse
28 juin 2013
Interview de Pierre Verluise, directeur de recherche à l’IRIS, par Jean-Marie Decorse
Pourquoi le chômage des jeunes relève-t-il de l’urgence absolue à l’échelon européen ?

Les jeunes sont devenus une denrée rare dans l’Union européenne. Les Etats-membres ont des taux de fécondité très inférieurs au seuil de renouvellement des générations. La moyenne actuelle est de 1,6 enfant par femme alors qu’il en faudrait 2,1 pour renouveler la population. De plus, cette jeunesse de mieux en mieux formée nourrit des espoirs légitimes de trouver un emploi. Elle n’en est pas moins surexposée au risque de chômage, avec des taux qui atteignent parfois 50 % comme en Espagne pour les moins de 25 ans. Tout cela crée une tension sociale forte, d’autant que ces jeunes savent qu’ils sont aussi exposés à la  pression du paiement des retraites à venir ça fait donc beaucoup.  On peut comprendre que ces générations éprouvent un sentiment d’impasse et de colère.


Six milliards débloques, cela suffit-il ?



A l’évidence, non. A chaque échelle des régions, des Etats et de l’UE, il y a des efforts à engager pour redresser cette fécondité. Or, toutes les prévisions nous disent qu’on s’achemine vers une Europe vieillie. En 2008, le Parlement européen avait bâti le rapport Castex qui pointait déjà du doigt la nécessité d’une politique de population dirigée vers la famille, l’immigration, l’emploi. Mais ce rapport a été mis pour partie à la poubelle avec la crise de 2008. L’UE avait enfin compris qu’il fallait faire quelque chose pour les jeunes. Mais, comme à chaque fois en temps de crise, les politiques familiales sont rabotées. L’Europe roule en ce moment dans la direction inverse. Un autre point est la faiblesse de la recherche qui permettrait pourtant de tirer vers le haut la compétitivité de l’UE. Mais, là encore, on ne fait pas assez d’efforts, et ces 6 milliards, ne suffiront pas. Le sens de ce sommet, après avoir identifié les problèmes, se borne à essayer de mettre des cautères sur des jambes de bois. Le vrai problème de l’UE au-delà de ce sommet, c’est son risque d’effacement pour des raisons démographiques, mais aussi économiques car il y a trop de chômage des jeunes et pas assez de compétitivité.